À ARCO 2019 (Madrid), l'avant-garde de l'art reflète la société
Partager

"Janis Joe", de la peintre chilienne Cecilia Vicuña. (Photo Pilar Valero)

par Pilar VALERO

MADRID, 1er mars 2019 (LatinReporters.com) - Outre la diversité de styles, la 38ème édition de la Foire internationale d'art contemporain (ARCO) de Madrid se caractérise par la tendance générale de l’avant-garde de l’art à refléter la société actuelle, avec ses conflits et exigences.

L'abstrait y semble délaissé pour faire place à une évolution esthétique intégrant des messages sociaux qui conduisent à une réflexion sur des préoccupations environnementales, politiques ou très actuelles telles que les féministes.

"L'art d'aujourd'hui est avant tout social, il s'intéresse à son environnement", estime le directeur de la foire, Carlos Urroz.

À ARCO 2019 participent, du 27 février au 3 mars, 203 galeries de 31 pays, offrant un panorama d'artistes consacrés ou émergents qui exposent leurs peintures, sculptures, photographies, estampes, dessins ou vidéos.

"Sex machine", œuvre de la Péruvienne Wynnie Mynerva. (Photo Pilar Valero)
La Pérou, pays invité

En tant que pays invité, le Pérou présente cette année un large éventail de son riche potentiel artistique, tant dans le cadre de la foire que dans douze autres expositions parallèles accueillies par différents musées de la région de Madrid.

Les échantillons du pays andin font un voyage chronologique à travers son histoire de l'art: l'empire Inca, la culture dite Nasca, développée sur la côte désertique au sud de Lima, le vice-royaume du Pérou, l'indigénisme et la région amazonienne, très considérée aujourd'hui.

La ligne thématique la plus remarquable est qu’au niveau local, ils posent des problèmes universels.

"Certains artistes explorent les tensions sociales résultant du colonialisme et remettent en question la naturalisation de critères ethniques, raciaux ou de classe, ou réfléchissent aux conséquences des processus industriels et extractifs sur l'environnement naturel", déclare la commissaire du Programme Pérou d'ARCO, Sharon Lerner.

"Seuls les morts ont vu la fin de la guerre", du Mexicain Omar Rodríguez. (Photo Pilar Valero)
L'Amérique latine est l'une des régions les plus représentées de la foire de Madrid. Sa présence artistique compte pour 29% de la participation internationale à ARCO.

La production de ses artistes d’avant-garde lie le traditionnel au présent, avec des références à la culture autochtone et à des messages sociaux ou plus irrévérencieux, certains de style naïf, d’autres plus conceptuels, mais en général très colorés.

Parmi les œuvres les plus chères que présente cette année ARCO figure "Personnage et oiseau" (1963) de Joan Miró, à la vente pour quatre millions d’euros, mais d’autres plus abordables tournent autour de mille euros.

Polémique

La polémique de cette année a été provoquée par une sculpture "Ninot" [les ninots sont les œuvres en bois, carton, cire, etc. brûlées lors des fallas de Valence] représentant l'actuel roi d'Espagne Felipe VI. Ses auteurs, Santiago Sierra et Eugenio Merino, la vendent au prix de 200 000 euros à la condition contractuelle qu'elle soit brûlée avant un an.

Un roi géant, parfumé et ... condamné au bûcher. (Photo Pilar Valero)
Pour accentuer le réalisme, la sculpture, de 4 mètres de haut, est vaporisée toutes les heures avec le parfum préféré du monarque.

Eugenio Merino avait déjà secoué ARCO en 2012 avec une statue du dictateur Franco momifié dans un réfrigérateur et Santiago Sierra l'an dernier avec son œuvre "Les prisonniers politiques de l'Espagne contemporaine", en référence aux leaders indépendantistes catalans, censurée par la direction de la foire.

À noter aussi l'importance croissante de nouvelles modalités artistiques liées à l’évolution technologique, telles que le dénommé art vidéo, avec images numériques mouvantes et son.