Élections catalanes transformées en plébiscite sur l’indépendance
L’Espagne rejetée en septembre par la Catalogne?
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Le président catalan Artur Mas signe, le 3 août 2015 à Barcelone, le décret convoquant les élections régionales du 27 septembre. (Photo Generalitat de Catalunya)

MADRID / BARCELONE, 5 août 2015 (LatinReporters.com) - Les élections régionales légalement convoquées en Catalogne pour le 27 septembre seront de fait, n’en déplaise à Madrid, un plébiscite sur l’indépendance d’une riche région de la taille de la Belgique et de 7,5 millions d’habitants.

Le pari du président de la Catalogne, Artur Mas, est loin d’être gagné. Mais l’évolution de son défi indépendantiste, après le référendum symbolique illégal de novembre 2014, fait désormais retentir l’alarme dans le reste de l’Espagne.

Ce défi est l’une des principales « menaces » pour la récupération économique du pays, admet Mariano Rajoy, chef du gouvernement espagnol et président du Parti populaire (PP, droite).

Liste unitaire pour l'indépendance

Rajoy prétend néanmoins qu’« il n’y aura pas d’indépendance de la Catalogne » et même qu’« il n’y aura pas d’élections plébiscitaires, car la loi l’interdit ».

Le pare-feu juridique de Madrid est pourtant aléatoire. La loi ne pouvait en effet empêcher la convocation des élections catalanes du 27 septembre et, comme le note la vice-présidente catalane Neus Munté, c’est du point de vue politique que le scrutin aura un « caractère plébiscitaire ».

Cette opinion est étayée par le front commun que les partis nationalistes et indépendantistes, surmontant leurs divisions, ont formé en juillet dans la perspective des régionales.

Leur liste unitaire, "Ensemble pour le oui", comprend les deux principales forces politiques catalanes - le parti d’Artur Mas, Convergencia Democratica (CDC, conservateur), et Esquerra Republicana (ERC, gauche) – ainsi que d'influentes associations nationalistes ayant organisé des manifestations massives ces dernières années.


Quelle majorité ?

Avec l'appui du petit parti anticapitaliste CUP, indépendantiste aussi, le bloc séparatiste compte remporter la majorité absolue au Parlement régional, suffisante, selon certains de ses membres, pour dire adiós à l’Espagne entre neuf et dix-huit mois après le vote du 27 septembre.

Mais afin que « les résultats (électoraux) soient clairs aux yeux de l’État (espagnol) et de la communauté internationale », comme le souhaite Neus Munté, une majorité en sièges demeurerait politiquement et moralement insuffisante si elle ne s’accompagnait pas d’une nette majorité absolue en voix du front indépendantiste.

À cet égard, Mariano Rajoy serait peut-être le premier à revendiquer le caractère plébiscitaire qu’il refuse aujourd’hui au scrutin si la majorité des voix était conquise par les partis « espagnolistes ».

Plusieurs ministres de Rajoy ont évoqué la possibilité d'utiliser l'article 155 de la Constitution espagnole, permettant de suspendre l'autonomie d'une région si elle viole le droit. Les indépendantistes ont répondu que si l'on en arrivait à cette extrémité, ils déclareraient d'emblée la sécession.

Des événements graves, éventuellement violents, ne seraient donc pas à exclure. L’Union européenne devrait logiquement s’en préoccuper. Pour l’heure, elle répète publiquement, comme Mariano Rajoy, qu’une Catalogne indépendante n’appartiendrait plus à l’UE.

L'importance de Podemos

Paradoxalement, l’Espagne devra peut–être son salut à la nouvelle gauche, incarnée principalement par le parti anti-austérité Podemos, que Rajoy qualifie pourtant de « populiste ».

En mai dernier, au grand dam des nationalistes, la mairie de la capitale catalane, Barcelone, était comme celle de Madrid conquise par une plate-forme citoyenne soutenue par Podemos.

Relativisant le débat identitaire catalan en l’estompant sous le débat socio-économique, ce nouveau type de coalition, qui a détourné une frange de l’électorat séparatiste, se présentera aussi aux régionales du 27 septembre. Son message dénonce l’austérité et la corruption qui caractérisent tant le CDC d’Artur Mas que le PP de Mariano Rajoy.

Et si le secrétaire général de Podemos, Pablo Iglesias, reconnaît aux peuples d’Espagne « le droit de décider », il se garde de se prononcer en faveur de leur indépendance.

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