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Offensive patriotique contre le gouvernement socialiste de M. Zapatero
Mariano Rajoy (droite) appelle à inonder l'Espagne de drapeaux pour la fête nationale

MADRID, jeudi 11 octobre 2007 (LatinReporters.com) - Sur un ton institutionnel utilisé d'ordinaire par le roi Juan Carlos, le chef de l'opposition de droite, Mariano Rajoy, a appelé les Espagnols à inonder le pays de drapeaux pour la fête nationale du 12 octobre. A 5 mois des élections législatives, ce brûlot patriotique vise le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero. Le fond et la forme du message suscitent la polémique.

Sur une photo de Mariano Rajoy, le titre "Il se prend pour le roi" barrait jeudi toute la une du nouveau quotidien national de gauche Publico. Même les journaux favorables au dirigeant conservateur notent que son initiative est sans précédent.

Challenger du socialiste Zapatero aux prochaines législatives de mars 2008 et président du Parti Populaire (PP, droite), M. Rajoy fait la une de tous les médias espagnols. Il le doit à la diffusion, mercredi sur l'intégralité des chaînes de télévision et dans la galaxie Internet (y compris le site mondial You Tube), de sa courte mais percutante vidéo institutionnelle réalisée pour la fête nationale espagnole du 12 octobre. Ce jour dit de l'Hispanidad (Hispanité) est aussi l'anniversaire de la découverte des Amériques par Christophe Colomb.

Flanqué d'un drapeau espagnol, le chef de la droite y appelle ses concitoyens à "célébrer cette fête de manière spéciale pour des raisons que tout le monde connaît".

Il n'explicite pas ces raisons dans son message, mais les Espagnols ont été sensibilisés ces dernières semaines par la reprise des attentats des séparatistes basques de l'ETA, le défi du président du gouvernement régional basque annonçant un référendum souverainiste pour octobre 2008, l'absence du drapeau national sur des édifices publics basques et catalans, les outrages au roi Juan Carlos, brûlé en effigie sur des places publiques par des militants de la Gauche républicaine catalane (alliée parlementaire de M. Zapatero), et la relance du projet de loi dit de la Mémoire historique, qui rouvre les plaies de la guerre civile de 1936-1939.

Selon le PP, ce panorama illustrerait l'échec du gouvernement de M. Zapatero, en particulier de sa politique de concessions aux nationalismes périphériques.

Et pour célébrer le 12 octobre "de manière spéciale", Mariano Rajoy exhorte donc les Espagnols à inonder le pays des couleurs nationales sang et or, à exhiber avec les drapeaux "l'orgueil d'être espagnol". L'appel concerne implicitement surtout Madrid, citadelle de la droite. Aux élections municipales du 27 mai dernier, le PP (55% des votes) y écrasa les socialistes (30%). Or, c'est précisément dans la capitale qu'est prévue la célébration au plus haut niveau de la fête nationale, avec défilé militaire devant le roi Juan Carlos, le gouvernement et les ambassadeurs. Les socialistes redoutent qu'une partie au moins de la foule n'insulte bruyamment M. Zapatero sous l'oeil des caméras de télévision.

La gauche socialiste et communiste accuse Mariano Rajoy et le PP de vouloir s'attribuer le monopole des symboles nationaux, ce qui serait contraire au véritable patriotisme. "L'histoire nous a enseigné que lorsque la droite se met à crier 'Espagne', de nombreux Espagnols frémissent" note José Blanco. Secrétaire à l'Organisation du PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol) et consacré par José Luis Rodriguez Zapatero comme "la voix du parti", José Blanco estime que "seul le chef de l'Etat pourrait adresser un message institutionnel à la nation et, heureusement pour l'Espagne, Rajoy n'est pas et ne sera jamais le chef de l'Etat".

Tant le PP que les éditorialistes des quotidiens El Mundo (droite libérale) et ABC (droite conservatrice) rappellent à la gauche que rien ne lui interdit d'utiliser aussi les symboles nationaux, en particulier le drapeau, comme le fit par exemple la socialiste Ségolène Royal pendant la campagne de la dernière élection présidentielle française.

Il est vrai que lors des manifestations de la gauche espagnole flottent souvent plus de drapeaux républicains que d'étendards nationaux. Trente-deux ans après la mort du dictateur Franco, le souvenir de son espagnolisme exacerbé drapé des couleurs sang et or nourrit encore de fortes allergies aux symboles patriotiques.

Transcription et traduction de la vidéo institutionnelle de Mariano Rajoy diffusée le 10 octobre:


Pasado mañana, doce de octubre, los españoles celebramos nuestra fiesta nacional.
Mi deseo es que este año, por razones que todo el mundo conoce, los españoles celebremos de manera especial esta fiesta.
Porque somos una nación y queremos celebrarlo y dejar constancia de que nos alegramos.
Por eso vamos a honrar y a exhibir el símbolo que, con la Corona, mejor nos representa en todo el mundo:
- La bandera que aprobamos en 1978.
- La que exhiben nuestros deportistas con orgullo.
- La que cubre el féretro de nuestros soldados.
- La que saludan con respeto todos los jefes de Estado que nos visitan.
- El símbolo de España.
- El símbolo de la nación libre y democrática que formamos más de cuarenta millones de españoles.
- La bandera de todos, porque en ella estamos todos representados.
Yo estoy orgulloso de ser español.
Sé que los españoles también lo están.
Y por eso, pido a todos que, por encima de cualquier diferencia ideológica, el doce de octubre lo manifiesten con franqueza.
Y que hagan algún gesto que muestre lo que guardan en su corazón.
En casa o en la calle, de forma individual o con la familia o con los amigos.
Para que todo el mundo sepa lo que los españoles sentimos por España.
Y que sabemos proclamarlo sin aspavientos pero con orgullo y con la cabeza bien alta.
Y yo me adelanto ya y digo a todos los españoles: ¡Feliz día de la nación española! ¡Feliz fiesta nacional!
Après-demain, 12 octobre, les Espagnols nous célébrons notre fête nationale.
Mon souhait est que cette année, pour des raisons que tout le monde connaît, les Espagnols célébrions cette fête de manière spéciale.
Parce que nous sommes une nation et nous voulons le célébrer et donner acte que nous nous réjouissons.
Pour cela nous allons honorer et exhiber le symbole qui, avec la Couronne, nous représente le mieux dans le monde entier:
-Le drapeau que nous avons approuvé en 1978.
-Celui qu'exhibent nos sportifs avec orgueil.
-Celui qui couvre le cercueil de nos soldats.
-Celui que saluent avec respect tous les chef d'Etat qui nous visitent.
-Le symbole de l'Espagne.
-Le symbole de la nation libre et démocratique que forment plus de quarante millions d'Espagnols.
-Le drapeau de tous, car en lui nous sommes tous représentés.
Je suis fier d'être espagnol.
Je sais que les Espagnols le sont aussi.
Et pour cela, je demande à tous que, par dessus toute différence idéologique, le 12 octobre vous le manifestiez avec franchise.
Et que chacun fasse un geste qui montre ce qu'il garde en son coeur.
A la maison, dans la rue, de forme individuelle ou en famille ou avec les amis.
Afin que tout le monde sache ce que les Espagnols sentent pour l'Espagne.
Et que nous sachions le proclamer sans simagrées mais avec orgueil et la tête bien haute.
Et je m'avance déjà à dire à tous les Espagnols: Joyeux jour de la nation espagnole! Joyeuse fête nationale!

Fête nationale : "ZAPATERO DEHORS"... "ZAPATERO DÉMISSION"

MADRID, vendredi 12 octobre 2007 (LatinReporters) - Pour la 3e année consécutive lors du défilé militaire de la fête nationale, une partie de la foule présente a hué et sifflé, le 12 octobre à Madrid, le président du gouvernement socialiste espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero.

Les cris "Zapatero dehors" et "Zapatero démission" furent assez puissants pour être entendus sur les chaînes de télévision qui retransmettaient en direct l'événement, y compris lorsque caméras et micros étaient centrés sur la zone officielle de la Plaza de Colón, à au moins 50 mètres de la foule située sur le Paseo de la Castellana.

Au long de ce boulevard monumental, le roi Juan Carlos a été applaudi lors de son arrivée et de son départ. M. Zapatero par contre, cherchant à éviter l'affront si prévisible qu'il l'a qualifié lui-même de "classique", avait gagné la tribune officielle et en était reparti par des voies latérales discrètes. Un stratagème apparemment peu utile.

Comme l'y avait appelé le leader conservateur Mariano Rajoy (article ci-dessus), la foule brandissait des milliers de drapeaux nationaux aux couleurs sang et or. Mais ces drapeaux n'ont inondé ni le reste de la capitale ni moins encore l'ensemble de l'Espagne. Ils flottaient çà et là sur quelques balcons, comme chaque 12 octobre.

L'appel institutionnel de M. Rajoy, qui invitait la nation à exhiber avec les drapeaux "l'orgueil d'être espagnol", aura donc eu un effet plus médiatique que réel.




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