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La guérilla devrait libérer le journaliste français ce mercredi 30 mai
Colombie-Farc: vidéo preuve de vie avant libération de Langlois
 

BOGOTA, mardi 29 mai 2012 (LatinReporters.com) - "On sait à quoi on s'expose quand on fait ce travail" dit de lui-même en espagnol un Roméo Langlois souriant, quoique blessé par balle au bras gauche, sur une vidéo des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie) diffusée lundi par la chaîne panaméricaine Telesur comme preuve de vie du journaliste français. Dans un communiqué connu dimanche, la guérilla a fixé à ce prochain mercredi 30 mai la date de sa libération.

Capturé le 28 avril lorsqu'il accompagnait une unité antidrogue de l'armée tombée dans une embuscade des Farc, le correspondant en Colombie de la chaîne France 24 et du quotidien Le Figaro est filmé à une date indéterminée presque nu, assis avec une serviette de bain sur les genoux, comme s'il sortait de la douche. Il répond à une supposée guérillera qu'on ne voit pas.

"Langlois, L, A, N, G, L, O, I, S" dit-il en épelant son nom, avant d'encourager son interlocutrice: "Allez-y, posez-moi plus de questions si vous voulez (...) C'est bizarre, d'habitude, c'est moi qui pose les questions puisque je suis journaliste, mais ça me va."

"Je suis civil, journaliste international français", réaffirme Roméo Langlois, pourtant considéré par les Farc comme prisonnier de guerre car, selon la guérilla, il portait une tenue militaire au moment de sa capture, ce qu'à Bogota nie le ministère de la Défense colombien.

"Le gouvernement (colombien) n'a jamais été tendre avec moi"

Lorsqu'on lui demande s'il savait qu'il s'aventurait "dans une zone rouge" en accompagnant l'armée pour un reportage dans le département de Caqueta, bastion des Farc dans le sud colombien, le journaliste répond qu' "on sait à quoi on s'expose quand on fait ce travail". Il ajoute qu'il a "travaillé aussi avec la guérilla à maintes reprises", interviewant plusieurs de ses dirigeants, dont Raul Reyes, ex-numéro deux des insurgés, tué dans un bombardement aérien en 2008.

"On sait à quoi on s'expose quand on fait ce type d'activités" insiste Roméo Langlois. Il admet toutefois, à propos de l'embuscade du 28 avril dans laquelle périrent quatre militaires, qu' "en vérité, je ne pensais pas que cela allait devenir si terrible".

Néanmoins, cette vidéo présentée comme preuve de vie du reporter français le montre sans crainte et même à l'aise dans le camp des Farc où il est filmé. "Le gouvernement [colombien] n'a jamais été tendre avec moi, parce que je suis toujours allé auprès de toutes les parties, pour collecter les avis de chacun", l'entend-on dire.

On voit ensuite des guérilleros soignant le bras gauche de Roméo Langlois. Sa blessure semble large et profonde, mais elle n'inspire apparemment aucune inquiétude.

Dans une autre séquence diffusée sur Telesur, un chef guérillero présenté comme Colacho Mendoza (voir vidéo ci-dessous), commandant du "Front 15" qui avait capturé Roméo Langlois, réaffirme que le journaliste portait le 28 avril des vêtements militaires et que, blessé, il s'était rendu aux Farc en levant les bras, "comprenant qu'il n'y avait pas d'autre issue (...) que de se laisser capturer ou mourir dans la bataille".

Le même commandant rebelle minimise l'importance donnée par l'armée à l'opération antidrogue du 28 avril, indiquant que "ce n'est un secret pour personne que dans la région le paysan n'a pas d'autre choix que de vivre de la coca".

Opérations militaires suspendues durant 36 heures

Roméo Langlois sera remis mercredi par la guérilla marxiste à une mission humanitaire conduite par des délégués du CICR (Comité international de la Croix-Rouge) et incluant, à la demande des Farc, l'ex-sénatrice Piedad Cordoba, directrice de l'ONG Colombiens pour la paix, ainsi qu'un émissaire du président français François Hollande. Bien en cour auprès des Farc, Telesur, dont le siège central est au Venezuela qui assure l'essentiel de son financement, jouira peut-être de l'exclusivité médiatique de cette libération.

Cité par l'AFP, l'ambassadeur de France en Colombie, Pierre-Jean Vandoorne, a laissé entendre que le journaliste français serait transféré à Bogota, puis en France pour y retrouver sa famille: "Son plus cher désir, une fois qu'il aura embrassé ses amis à Bogota (...), c'est de retourner en France pour embrasser ses parents, qui l'attendent".

Le porte-parole du CICR en Colombie, Jordi Raich, a précisé lundi que la libération se ferait "par voie terrestre" et non par hélicoptère comme les précédentes libérations d'otages. L'armée colombienne s'est de son côté engagée à suspendre ses opérations militaires durant 36 heures, du mardi soir au jeudi matin, une condition posée par les rebelles pour garantir leur sécurité.

Fondée en 1964, la principale guérilla du pays compte encore 9.200 combattants, repliés dans des régions de montagne et de forêt. Elle s'est engagée en février à renoncer à la pratique des enlèvements contre rançon.


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