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VIe Sommet Union européenne - Amérique latine et Caraïbes les 17 et 18 mai 2010 à Madrid
Cuba / Europe : l'Espagne invite Raul Castro au sommet UE-ALC

LA HAVANE / MADRID, mardi 20 octobre 2009 (LatinReporters.com) - Le chef d'un régime militaire qui prohibe le pluralisme depuis un demi-siècle va siéger aux côtés des plus hauts représentants des démocraties européennes si celles-ci ne réagissent pas. Le général Raul Castro, président de Cuba depuis le retrait en février 2008 de son frère Fidel malade, est en effet invité par l'Espagne du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero à participer au VIe Sommet Union européenne - Amérique latine et Caraïbes (UE-ALC), les 17 et 18 mai 2010 à Madrid.

L'invitation a été formulée par le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, lors de son entretien avec le général-président Raul Castro, le 19 octobre à La Havane. Le ministre espagnol s'est refusé à toute rencontre avec la dissidence cubaine. Selon celle-ci, plus de deux cents prisonniers politiques sont incarcérés à Cuba.

A noter que c'est au nom de la démocratie que M. Moratinos fut le premier à prôner le rappel des ambassadeurs européens au Honduras après la défenestration, le 28 juin dernier à Tegucigalpa, du président Manuel Zelaya. Le président hondurien déchu est l'allié des frères Castro et du président vénézuélien Hugo Chavez.

L'Espagne présidera l'Union européenne au premier semestre 2010. A ce titre, elle accueillera aussi, notamment, le sommet annuel UE / Etats-Unis, les 24 et 25 mai à Madrid avec la participation du président Barack Obama, et le IIe Sommet de l'Union pour la Méditerranée, les 5 et 6 juin, également dans la capitale espagnole.

Miguel Angel Moratinos a assuré le général-président Raul Castro que modifier la politique de l'Europe communautaire à l'égard de Cuba sera un "objectif prioritaire" de la présidence espagnole de l'UE. Selon ses propres déclarations aux journalistes, le ministre Moratinos a réitéré au leader cubain sa "volonté d'abandonner la Position commune [de l'UE envers Cuba] et de lui substituer un accord bilatéral".

Ladite Position commune régit théoriquement depuis 1996 l'attitude de l'UE dans ses relations et sa coopération avec Cuba en fonction du respect des droits de l'homme dans l'île. La Havane ne s'estime pas satisfaite par la levée, en 2008 sur proposition de Madrid, de sanctions diplomatiques symboliques imposées en 2003 par l'UE après l'incarcération de 75 dissidents cubains. Le ministère cubain des Relations extérieures réaffirmait lundi dans un communiqué que tout progrès dans les négociations avec l'UE dépend de "l'élimination de l'unilatérale Position commune", qualifiée d'"ingérence" dans la politique intérieure cubaine.

La Position commune européenne à l'égard de Cuba ne pourrait toutefois être modifiée que par le consensus, c'est-à-dire l'unanimité, des 27 pays de l'UE. Le Ministre Moratinos reconnaît que "ce sera difficile".

Comme la plupart des dissidents cubains, la Suède, actuelle présidente de l'UE, la République tchèque et des poids lourds tels que le Royaume-Uni et l'Allemagne exigent au préalable des progrès significatifs de La Havane en matière des droits de l'homme. Il suffirait peut-être que ces pays réaffirment publiquement leur position pour que Raul Castro juge lui-même inutile sa présence au prochain sommet UE-ALC.

Le 3 juin dernier, dans le fil de la politique d'ouverture de Barack Obama, l'Organisation des Etats américains (OEA) révoquait à l'unanimité l'exclusion de Cuba de cet organisme continental, mais sans offrir à l'île des frères Castro une réintégration automatique, que La Havane prétend d'ailleurs ne pas revendiquer. Un communiqué de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton explicitait alors la résolution de l'OEA en affirmant que "Cuba peut revenir à l'OEA dans le futur si l'OEA décide que sa participation satisfait aux objectifs et principes de l'organisation, y compris la démocratie et les droits de l'homme".

Cette prudence éthique et réaliste ne semble pas partagée par le gouvernement socialiste espagnol de José Luis Rodriguez Zapatero. L'Espagne se prévaut néanmoins de la libération, après la visite du ministre Moratinos et apparemment en contrepartie des satisfactions qu'il a offertes au régime castriste, de deux dissidents cubains, Nelson Aguiar et Omelio Lazaro Angulo. L'homme d'affaires espagnol Pedro Hermosilla a aussi été élargi, mais il ne pourra pas quitter l'île avant d'y être jugé pour corruption présumée.



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