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RÉACTION DE BEÑAT OTEIZA, l'un des dirigeants en France du Parti Nationaliste Basque,
à l'article du 06.05.2009 "Espagne - Le socialiste Patxi Lopez préside le Pays basque: déclin des nationalismes historiques?"

[10.07.2009 - 11h53]

L'impression générale de cet article est celle du « politiquement correct » espagnol. Les gentils « non nationalistes » espagnols prennent le pouvoir au Pays basque, comme en Catalogne et en Galice, face aux méchants « nationalistes ».

J'ai de plus en plus l'impression que les vrais nationalistes ne sont pas ceux que l'on croit.

Cet article est le reflet classique des peurs nationalistes espagnoles.

D'où vient le sentiment de menace de « l'intégrité territoriale » si ce n'est un réflexe nationaliste de la nation espagnole soi-disant en danger.

Le sentiment victimaire, typique du nationalisme est particulièrement aigu sur la question linguistique : « Il (Patxi Lopez) abrogera notamment les décrets qui marginalisent la langue espagnole dans les écoles basques ». Effectivement, un projet de loi était en discussion pour renforcer la présence de l'euskara, pour compenser sa faiblesse sociale et rendre chaque enfant bilingue. Et alors ? Quiconque visite le Pays basque sud se rend compte de la prédominance de l'espagnol. Mais cette inégalité là est normale. Par contre, faire en sorte que comme le prévoit la loi, chaque enfant soit hispanophone et bascophone serait rompre l'égalité.

Les partis espagnolistes font de la démagogie nationaliste.

Dans la même veine. « Il (Patxi Lopez) rétablira le pluralisme dans les médias publics régionaux transformés par le PNV en instruments souverainistes ». Il s'agit du groupe public EITB et en particulier d'Euskal Telebista, la télé publique basque. Cette malheureuse télé est la seule en Espagne à donner la parole de façon équitable à toutes les tendances du mouvement abertzale basque et du nationalisme espagnol. Et oui, cette télé a souvent des accents nationalistes. Incroyable non pour un média qui est le reflet d'une société majoritairement abertzale ! Bienvenue sans doute au pluralisme façon espagnol, des débats qui comme à CNN+ donnent la parole à des intervenants aussi anti abertzale les uns que les autres pour traiter des questions du Pays basque. Quand aux auditeurs interdits d'antennes pour leur opinion abertzale, c'est une pratique médiatique courante. Par contre, lorsqu'Egunkaria, le seul quotidien en langue basque est fermé de façon arbitraire, où sont les protestations de leurs collègues journalistes espagnols ou français ? On les attend encore. A l'époque, le soupçon de collusion avec ETA était soi-disant trop fort. Les dirigeants de ce journal sont torturés. Mais non ce ne sont que des affabulations de terroristes. Et puis récemment, dans le quasi anonymat, cette affaire a été classée sans suite. Y a-t-il eu le début d'une autocritique. Rien, au nom de la raison d'Etat du nationalisme espagnol.

Alors, les nationalismes périphériques en déclin ? Le nationalisme espagnol en rêve. Il explique ces phénomènes en fonction de sa mentalité autocentrée. « Une cause essentielle de la survie et de la vigueur des nationalismes basque et catalan est la difficulté éprouvée longtemps par ces régions, qui ont une identité historique et culturelle, à s'identifier à un Etat oppresseur ou défaillant ». Les dynamiques internes à ces nationalismes sont éludées même si la nature de l'Etat espagnol est évidemment un élément à prendre en compte.

L'an prochain, auront lieu les élections en Catalogne. CiU partenaire du PNV est le favori des sondages. On verra bien. En Pays basque, après analyse d'Euskobarometro, l'enquête sociologique du Gouvernement basque, il apparaît que plus de 70% des jeunes ont voté pour des mouvements abertzale, lors des dernières élections autonomiques.

Enfermé dans son nationalisme du XIXème siècle, l'Espagne lutte contre ses mouvements « séparatistes ». Ses mouvements ont démontré par leur discours et leur gestion un respect de la pluralité culturelle, linguistique et nationale y compris lors du fameux plan diabolisé du Lehendakari Ibarretxe. Ces nationalismes sont entrés dans la construction européenne en cours et regardent avec ironie cette crispation rétrograde de dirigeants espagnols fiers de leur conquête provisoire.



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