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Malgré sa vidéo avec Fidel Castro, l'état du président du Venezuela ne cesse d'inquiéter
Santé de Chavez : alarmisme relancé par le report du sommet de la CELAC
 

CARACAS, vendredi 1er juillet 2011 (LatinReporters.com) - Hôte désigné du sommet de la Communauté des Etats latino-américains et caribéens (CELAC) prévu pour les 5 et 6 juillet, le Venezuela annonçait mercredi son ajournement à cause "du processus de récupération et du traitement médical extrêmement strict" du président Hugo Chavez, hospitalisé à Cuba depuis le 10 juin. Ce report réduit l'effet tranquillisant recherché par la diffusion, quelques heures plus tôt, d'une vidéo et de photos du président, en bonne forme relative aux côtés de Fidel Castro.

Dix-huit jours après une opération d'urgence en pleine visite officielle à Cuba, officiellement pour neutraliser un abcès pelvien, Hugo Chavez réapparaissait pour la première fois mardi soir à la télévision publique, puis mercredi dans une version plus longue, sur des images vidéo le montrant un peu amaigri, marchant d'un pas lent, mais plaisantant et conversant d'une voix assurée avec le père de la révolution cubaine.

Selon le vice-président vénézuélien, Elias Jaua, ces images confirment la récupération de Hugo Chavez et confortent les démentis opposés par les autorités "au chantage, au terrorisme, à la désinformation" de ceux qui entretiennent l'alarmisme sur la santé du leader bolivarien. Le gouvernement de Caracas avait déjà attribué auparavant à une offensive de "la droite nationale et internationale" les rumeurs présentant le président dans un état critique ou atteint d'une maladie grave. La rumeur la plus persistante, celle d'un cancer de la prostate, court toujours.

La vidéo de Chavez et Castro, diffusée peu avant le report à une date indéterminée du sommet de la CELAC, a-t-elle été conçue pour amortir le choc de cet ajournement que le gouvernement savait inévitable en fonction de l'état de santé réel de Hugo Chavez? Mais n'était-ce pas contradictoire de diffuser des images d'un caudillo en supposée bonne forme pour annoncer aussitôt que sa "récupération" saborde le sommet dont il rêvait depuis des années?

Les 5 et 6 juillet, sur l'île vénézuélienne de Margarita, ce sont tous les chefs d'Etat ou de gouvernement des Amériques, à l'exception de ceux des Etats-Unis et du Canada, que Hugo Chavez devait accueillir pour le sommet historique, car constitutif, de la Communauté des Etats latino-américains et caribéens.

Conçue parallèlement à l'Organisation des Etats américains (OEA) qu'elle court-circuitera, cette CELAC devrait tenter de matérialiser l'émancipation de l'Amérique latine de toute tutelle des Etats-Unis. "Il s'agit de l'événement politique le plus important survenu dans notre Amérique depuis cent ans et même plus" proclamait Hugo Chavez, le 26 avril dernier à Caracas, lors d'une réunion préparatoire du sommet. Dès lors, pouvait-on imaginer, à propos du mal dont souffre le président vénézuélien, une nouvelle plus alarmiste que l'ajournement de cette réunion continentale à cause de sa santé?

Et de surcroît, le sommet devait coïncider avec la célébration, le 5 juillet, du bicentenaire de la proclamation de l'indépendance du Venezuela. Présider le défilé militaire de ce 200e anniversaire, dont son responsable, le général Carlos Alcala, a annoncé qu'il sera le plus spectaculaire de l'histoire du Venezuela, "faisait rêver Chavez depuis douze ans [qu'il est au pouvoir], mais il semble que le destin veuille qu'il ne soit pas là" commente l'une des figures les plus singulières de l'opposition, Teodoro Petkoff.

Successivement fameux dirigeant et guérillero communiste des années 60, député, ministre, candidat à la présidence et aujourd'hui éditeur du journal national Tal Cual, refuge de grandes signatures qui ne ménagent pas le socialisme bolivarien, Teodoro Petkoff estime "évident que la suspension du sommet [de la CELAC] est directement liée" à la santé de Hugo Chavez.

"A Caracas, on sait que le président ne manquerait jamais une fête bolivarienne comme celle du bicentenaire et s'il n'y assiste pas, cela renforcerait le diagnostic extraofficiel qu'il puisse souffrir d'une maladie grave, tel un cancer" écrivait pour sa part jeudi Maye Primera, connue des lecteurs de Tal Cual et correspondante à Caracas de l'influent quotidien espagnol El Pais.

Un autre journaliste vénézuélien très suivi, Nelson Bocaranda, maintient que Chavez est atteint d'un cancer de la prostate, qu'il est en phase de récupération avec des chances de survie de 80%, quoique certains se positionnent déjà pour briguer la succession au cas où les forces du chef de l'Etat l'abandonneraient. Dans ce contexte, le plus cité est Adan Chavez, frère aîné et mentor politique de Hugo, dont il fut le ministre de l'Education et l'ambassadeur à La Havane.

Sur la même longueur d'onde que Teodoro Petkoff, le leader universitaire antichaviste Diego Scharifker croit que "la suspension du sommet démontre, quoique les principaux porte-parole du gouvernement disent le contraire, que le président ne récupère pas. C'est plutôt l'inverse, il est dans des conditions assez lamentables".

Détentrice du record national de voix de préférence aux dernières législatives et unique femme ayant quelque possibilité d'être la candidate de la fédération des diverses oppositions à l'élection présidentielle de 2012, la députée Maria Corina Machado réclame "que soient activés les mécanismes constitutionnels" afin que le vice-président Elias Jaua assume la présidence le temps de la récupération de Hugo Chavez. Il n'y aurait ainsi, ajoute-t-elle, "aucune justification" à une éventuelle suspension du défilé militaire du bicentenaire de l'indépendance ni à l'ajournement du sommet de la CELAC.

Des observateurs notent que lier la tenue ou non de ce sommet à la santé d'une seule personnalité, Hugo Chavez, ne consolide ni les espoirs latino-américains inspirant la CELAC ni la croyance en la pérennité du régime chaviste, aujourd'hui plus qu'hier difficilement imaginable sans Hugo Chavez.


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