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A peine 10% des Colombiens pour le dialogue avec des rebelles qui méprisent le droit humanitaire

Colombie: casques bleus de l'ONU contre la guérilla?

Nouveau favori de l'élection présidentielle de mai, Alvaro Uribe Velez le propose

Affiche électorale
d'Alvaro Uribe Velez
BOGOTA, mercredi 30 janvier 2002 (LatinReporters.com) - Comme un météorite, le libéral dissident Alvaro Uribe Velez est propulsé en tête des sondages pour l'élection présidentielle du 26 mai publiés mercredi à Bogota. Sa fermeté à l'égard de la violence de la guérilla marxiste, qu'il envisage de combattre avec des forces internationales sous l'égide des Nations unies (ONU), explique la popularité de ce candidat indépendant menacé de mort par les rebelles.

Comme lui, 90% des Colombiens estiment négatifs les avantages octroyés depuis trois ans à la guérilla par le président conservateur Andres Pastrana, dont les efforts inutiles de paix, appuyés par l'ONU et l'Union européenne, ont aggravé le conflit.

Deux sondages distincts, publiés par six grands médias nationaux, octroient 39% ou 40% des intentions de vote à Alvaro Uribe Velez. Dans les deux cas, il devance de neuf points son concurrent direct, le candidat officiel du Parti libéral, Horacio Serpa. Ce dernier perd son statut de favori, même lors d'un second tour éventuel. En septembre 2001, Alvaro Uribe Velez séduisait à peine 23% des électeurs.

Forces multinationales
sous l'égide de l'ONU

Adversaire de la guérilla marxiste et des paramilitaires d'extrême droite, Alvaro Uribe Velez proposait le 12 décembre dernier au gouvernement de solliciter un appui de la communauté internationale à l'armée colombienne en matière de transport, de communications et de technologie. (Washington fournit déjà cette d'aide, mais en la limitant à la lutte contre le narcotrafic).

Dans une seconde étape, selon la même proposition, des forces multinationales sous contrôle de l'ONU renforceraient l'armée et la police colombiennes pour pacifier le pays. Il ne s'agirait donc pas d'une "intervention militaire étrangère", précisait Alvaro Uribe Velez.

Cette proposition a été rejetée par l'armée et par la classe politique traditionnelle. Mais elle gagne du terrain au sein de l'opinion publique. Selon l'un des sondages diffusés mercredi, un tiers des Colombiens l'approuverait déjà.

Désormais favori de l'élection présidentielle, Alvaro Uribe Velez estime que "les groupes armés ne négocieront véritablement que le jour où ils affronteront un gouvernement appuyé par la communauté internationale et des citoyens résolus".

L'appui des citoyens fait aujourd'hui défaut au président conservateur Andres Pastrana. Le candidat présidentiel de son parti est crédité de moins de 2% (1,4% exactement) des intentions de vote. En outre, à peine 10% des Colombiens interrogés estiment utile de négocier encore avec la guérilla.

Les excès de la guérilla
ont tué la gauche

Luis Eduardo Garzon, unique candidat de gauche à l'élection présidentielle du 26 mai, ne réunit plus que 0,9% des intentions de vote, contre 1,4% en septembre dernier.

Cette quasi disparition de la gauche colombienne est attribuée par les observateurs au mépris du droit humanitaire manifesté tant par la guérilla marxiste des FARC que par les rebelles pro-cubains de l'ELN.

Selon les sondages, les Colombiens ne font pas de distinction fondamentale entre ces deux mouvements considérés comme terroristes par Washington et projetant une image négative aux yeux de 90% des personnes interrogées.

"L'ascension d'Uribe est un authentique phénomène électoral" constate l'influent quotidien libéral "El Tiempo". Le journal explique que le candidat indépendant "a maintenu l'appui détecté il y a quatre mois parmi les classes supérieures, l'étendant aux classes moyennes et conquérant des villes telles que Bogota et Cali".

Les analystes attribuent l'émergence spectaculaire d'un candidat non soutenu par les partis traditionnels à sa dureté à l'égard de la guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie, 17.000 combattants) et à sa critique soutenue des concessions gouvernementales aux FARC. Avocat et professeur d'université de 49 ans, Alvaro Uribe Velez fut successivement maire de Medellin, gouverneur du département d'Antioquia et sénateur.

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Effectués à partir du 19 janvier, les derniers sondages tiennent compte de l'impact de l'accord conclu le 20 janvier par la guérilla et le gouvernement en vue d'un cessez-le-feu qui devrait être approuvé le 7 avril prochain.

Parrainé par l'ONU et les ambassadeurs de dix pays, dont quatre de l'Union européenne (France, Espagne, Italie, Suède), cet accord du 20 janvier ne prévoit, comme les précédents, qu'une promesse d'accord ultérieur. En échange, la guérilla a obtenu, une fois encore, la prorogation de la zone démilitarisée de 42.000 km2 -la superficie de la Suisse- octroyée fin 1998 par le président Pastrana aux FARC dans l'espoir d'y négocier la paix. Depuis 1964, le conflit interne colombien a fait plus de 200.000 morts et déplacé plus de deux millions de personnes.

L'ONU, l'Union européenne et le président Pastrana s'étaient félicités de l'accord du 20 janvier dans la mesure où, selon eux, il évitait une intensification du conflit. Or, depuis cette date, la guérilla des FARC a lancé une offensive sans précédent tant dans son intensité que dans son caractère terroriste, souligné par un mépris absolu du droit humanitaire international.

Voitures piégées et charges explosives activées dans les villes, sur les routes et même sur les cadavres d'ennemis pour décimer les sauveteurs ont tué en dix jours plus de 100 personnes, dont de nombreux civils et enfants.

L'offensive de la guérilla frappe oléoducs, gazoducs, ponts, pylônes électriques, centraux téléphoniques et circuits de distribution d'eau. Selon le maire de Bogota, Antanas Mockus, un attentat à l'explosif contre un barrage alimentant en eau les six millions d'habitants de Bogota a failli provoquer une catastrophe.

ONU: "Graves infractions au droit humanitaire international"

"Les attentats contre l'eau, les tours d'énergie et autres structures qui concernent la vie et le bien-être des civils sont des agressions contre les populations civiles et constituent de graves infractions au droit humanitaire international" vient d'avertir le bureau colombien de l'ONU.

Même l'Association latino-américaine des droits de l'homme, d'ordinaire très indulgente envers la gauche, accuse les FARC "de dégrader le conflit colombien, s'enfonçant dans une spirale d'horreur dont est victime la population civile".

"Les violents ne négocient pas sérieusement avec des gouvernements faibles" prédisait en novembre dernier Alvaro Uribe Velez. Selon lui, la guérilla applique l'enseignement de Marx et de Machiavel, "considérant comme une faiblesse dont il faut profiter toute générosité à son égard".

Effectivement, la montée en puissance des FARC s'est accélérée depuis que leur a été octroyé le contrôle d'une immense zone démilitarisée, devenue un entrepôt d'armes financées par la cocaïne, un camp d'entraînement pour rebelles, une prison pour civils séquestrés contre rançon et une base d'attaques lancées contre diverses régions de Colombie.

Alvaro Uribe Velez cite l'exemple du Salvador. "La guérilla n'y négocia pas volontairement. Elle le fit, car elle y avait perdu l'espoir de conquérir le pouvoir par la violence". Il prévient les FARC que, s'il est élu président, toute concession devra avoir pour contrepartie la fin effective des hostilités.

S'il parle moins de l'autre guérilla de Colombie, la pro-cubaine ELN (Armée de libération nationale, 5.000 hommes), actuellement en négociation avec des émissaires colombiens à La Havane, le favori de l'élection présidentielle devrait lui opposer une fermeté identique.


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