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L'UDI "pinochetiste" devient le premier parti du pays - Egalité gauche-droite au sénat

Chili-élections législatives: la droite talonne le centre gauche, qui reste majoritaire, mais qui devra négocier

par Christian Galloy

Ricardo Lagos,
président du Chili
© Presidencia de
la Republica
SANTIAGO DU CHILI, mardi 18 décembre 2001 (LatinReporters.com) - La montée spectaculaire de la droite à la Chambre des députés et l'égalité gauche-droite au sénat obligeront  le gouvernement de centre gauche du président socialiste chilien Ricardo Lagos à négocier avec l'opposition la quasi totalité des lois qu'il soumettra au Congrès national (parlement). La droite et en particulier les ultras de l'Union démocrate indépendante (UDI), devenue le premier parti du Chili, ont réalisé dimanche leur meilleur score sur l'ensemble des quatre élections législatives convoquées au Chili depuis la fin de la dictature militaire.

Les Chiliens renouvelaient dimanche la totalité de leurs 120 députés et 18 de leurs 38 sénateurs élus démocratiquement. (La chambre haute comprend aussi deux sénateurs désignés à vie, dont le général Augusto Pinochet, et neuf sénateurs institutionnels).

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En recul pour l'élection de la Chambre avec 47,9% des suffrages nationaux (contre 50,51% en 1997) et 63 députés sur 120, soit une perte de sept élus, la Concertation de partis pour la démocratie du président Lagos a conservé de justesse sa majorité absolue parlementaire. Il s'agit malgré tout d'un exploit, compte tenu de l'usure naturelle découlant de onze années de pouvoir de cette coalition qui unit socialistes, sociaux-démocrates et démocrates-chrétiens.

En contrepartie, la coalition de droite Alliance pour le Chili a bondi de 36,26% à 44,27% des suffrages et de 49 à 57 députés, soit à peine quatre de moins que la majorité absolue.

Et au sein même de la droite, ce sont les ultras de l'UDI qui progressent le plus, sautant de 14,45% à 25,19% des votes nationaux, arrachant ainsi à la vieille démocratie chrétienne son statut historique de premier parti du Chili.

Très liée pendant des années au général Pinochet, l'UDI a eu l'intelligence tactique pendant la campagne électorale de se démarquer de l'ex-dictateur, totalement absent du débat politique chilien pour la première fois depuis son coup d´Etat de 1973.

Comme prévu, le scrutin "binominal" en vigueur au Chili a permis aux deux grandes coalitions de monopoliser à nouveau les élus. Le parti communiste de Gladys Marin reste exclu de la vie parlementaire. Avec 5,21% des voix (7,49% en 1997), il échappe de peu à la perte du statut légal, refusé aux formations n'obtenant pas au moins 5% des suffrages.

Quant au renouvellement de 18 sénateurs, la droite et le centre gauche en ont fait élire chacun 9. L'égalité s'installe aussi dans la nouvelle composition globale du sénat. La coalition gouvernementale en perd donc le contrôle. Elle y serait même minoritaire si Augusto Pinochet revenait siéger à la Chambre haute en sa qualité de sénateur à vie. Mais déclaré en juillet dernier mentalement inapte à être jugé pour les crimes commis sous sa dictature, le général, âgé de 86 ans et très malade, pourrait difficilement se présenter comme mentalement apte à légiférer.

Le recul de la coalition gouvernementale ne remet pas en question le mandat du président socialiste Ricardo Lagos. Il restera chef de l'Etat jusqu'à l'élection présidentielle de 2005. Revendiquant la victoire, car "en démocratie gagne celui qui a le plus de votes", Ricardo Lagos a appelé, dimanche, les 15 millions de Chiliens à "être capables de suivre un chemin de concorde et d'amitié".

Cet appel au dialogue avait été précédé de l'offre de collaboration qu'adressait au gouvernement le chef naturel de la droite, Joaquin Lavin, maire de Santiago et "locomotive" de l'UDI.

Constatant, au vu des résultats des élections, qu'il y avait désormais au Chili "deux moitiés" et s'exprimant implicitement au nom de l'une d'elles, Joaquin Lavin a mis la coalition de droite "à disposition du gouvernement pour travailler ensemble, notamment contre le chômage et la délinquance".

Joaquin Lavin estime que la droite est devenue "une option réelle de gouvernement" et son offre de collaboration vise certainement à mette en valeur son sens des responsabilités dans la perspective de sa candidature à l'élection présidentielle de 2005.

En proposant l'embrassade a l'exécutif de centre gauche, la droite rêve sans doute de l'étouffer. Mais le président Ricardo Lagos ne pourra pas refuser longtemps cette collaboration, qu'elle soit empoisonnée ou sincère. Ni  à la Chambre ni moins encore au sénat, il ne dispose d'une majorité qualifiée. Or, une telle majorité, des trois cinquièmes ou des deux tiers selon les sujets, est requise pour réformer et démocratiser la Constitution héritée de la dictature du général Pinochet.

Sans consensus avec l'opposition conservatrice, impossible d'enlever aux militaires leur rôle de garant des institutions, de permettre au président de la République de nommer et destituer les commandants en chef des forces armées, de démilitariser les Carabiniers (police dépendant du ministère de la Défense), d'abolir la nomination de sénateurs désignés par l'armée, de réformer le système électoral qui étouffe les minorités ou de modifier les attributions du Conseil de sécurité national, au sein duquel le président de la République et les chefs militaires siègent au même niveau.

La légalisation du divorce, le Chili étant le dernier pays du monde où il est interdit, dépendra aussi du bon vouloir de la droite, réticente devant ce dossier.


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