Accueil   |  Politique   |  Economie   |  Multimédia   |  Société   |  Pays+dossiers   | Forum 
Google
 
Web LatinReporters.com
"Bande des quatre" (France, Allemagne, Belgique et Luxembourg) "insignifiante"?

Après-guerre Irak et défense européenne: l'Espagne
qualifie le mini-sommet de Bruxelles de "facteur de division"

VOIR AUSSI

Guerre Irak et
Espagne: "brouillon"
d'arme de destruction
massive...de la
démocratie

Guerre Irak:
Missile basque contre
le roi d'Espagne

L'Espagne en guerre
contre l'Irak de Saddam
Hussein: les raisons de
José Maria Aznar

Europe-Espagne-Irak:
l'Appel des huit vise
l'antiaméricanisme et
l'axe franco-allemand

Dossier: Guerre Irak
vue d'Espagne et
d'Amérique latine

Page Espagne

MADRID, jeudi 1er mai 2003 (LatinReporters.com) - Qualifiée officiellement à Madrid de "facteur de division" et "d'aventure" lancée par des pays désormais "insignifiants", la mini-Europe de la défense ébauchée mardi à Bruxelles par la France, l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg est critiquée en Espagne, même par des adversaires de la guerre en Irak. Que les quatre pays du mini-sommet de Bruxelles soient précisément les seuls adversaires européens ou presque de cette guerre accentuerait le caractère polémique de leur initiative prise, dit-on à Madrid, en marge de l'Alliance atlantique et de l'Union européenne.

"Ce n'est pas à trois ni à quatre qu'on fera une Europe de la défense" s'est exclamée à Madrid, en commission parlementaire, la ministre espagnole des Affaires extérieures, Ana Palacio. Elle s'exprimait au nom d'un gouvernement qui a été l'allié des Etats-Unis dans la guerre en Irak et qui le demeure dans l'après-guerre. L'Espagne participera à l'occupation dite intérimaire de ce pays arabe.

Aux yeux d'Ana Palacio, la défense européenne doit être "un projet commun, mais non d'exclusion". A ce propos, à Bruxelles, le président français Jacques Chirac, le chancelier allemand Gerhard Schröder et les Premiers ministres belge et luxembourgeois, Guy Verhofstadt et Jean-Claude Juncker, ont tout de même laissé la porte ouverte à leurs 21 partenaires de la future Europe des 25. Ils veulent notamment créer avant l'été 2004 à Tervueren, dans la banlieue de Bruxelles, un "noyau de capacité collective de planification et de conduite d'opérations", soit un quartier général militaire européen qui n'ose pas encore dire son nom et qui serait indépendant de l'OTAN.

Se référant à ce mini-sommet européen au moment même où il s'ouvrait, la ministre Palacio estimait que "toute aventure, aussi intéressante soit-elle, visant à construire la PESCD (Politique européenne commune de sécurité et de défense) hors du cadre de l'Union (européenne) n'aurait pas le droit de s'appeler européenne et lancée en plus dans un contexte polémique (celui concernant l'Irak), ce serait un facteur de division de l'Union (européenne) pouvant résulter contre-productif".

Selon Ana Palacio, "le problème de cette initiative est qu'en premier lieu elle est perçue comme venant des trois Etats qui ont adopté des attitudes déterminées au sein de l'OTAN (allusion aux réticences françaises, belges et, dans une moindre mesure, allemandes à protéger la Turquie dans le cadre de la crise irakienne). Et en second lieu, cette initiative n'est pas inscrite dans le cadre institutionnel (de l'Union européenne). Preuve en est que l'Espagne n'y participe pas, pas plus que la présidence (de l'Union européenne) ni son Haut représentant (pour la politique extérieure, Javier Solana)".

"Bande des quatre"

Lors de la comparution d'Ana Palacio en commission parlementaire, le porte-parole du Parti Populaire (parti gouvernemental conservateur), Guillermo Martínez Casañ, a ironisé sur "la grande inquiétude que me cause cette réunion de la bande des quatre, entre autres par la présence alarmante du Luxembourg, qui a tant à dire dans la future défense de l'Union européenne".

Puis, mercredi, en séance plénière du Congrès des députés, le président du gouvernement espagnol en personne, José Maria Aznar, se félicitait que l'Espagne, contrairement à ce que souhaitait l'opposition socialiste, n'ait pas été reléguée "du côté de ceux qui se retrouvent dans une position insignifiante et isolée sur la scène internationale".

Les "insignifiants" ne pouvaient être que les quatre adversaires de la guerre en Irak réunis au mini-sommet de Bruxelles. Le leader de l'opposition socialiste, José Luis Rodríguez Zapatero, venait de s'y référer, estimant que leur initiative répondait "à des fins raisonnables", mais que leur méthode était "améliorable".

Ce début de critique de la part d'un partisan déclaré du pacifisme français et allemand est significatif. Il reflète sans doute une déception provoquée par l'impression d'isolement dans laquelle se sont eux-mêmes piégés les participants au mini-sommet de Bruxelles, à peine quatre pays, alors que l'Union européenne en compte quinze et bientôt, dès l'an prochain, vingt-cinq.

D'autres adversaires espagnols de la guerre en Irak, tels les influents quotidiens El Pais, El Mundo et La Vanguardia sont eux aussi perplexes, voire critiques à propos de la réunion de Bruxelles.

"Le projet (de défense européenne) n'inclut pas le Royaume-Uni, principale puissance militaire en Europe, sans laquelle le plan n'arriverait pas à bon port" écrit l'envoyé spécial à Bruxelles d'El Pais. Il est vrai que la veille du mini-sommet de Bruxelles, le Premier ministre britannique Tony Blair en avait déjà pris le contre-pied, se déclarant en faveur d'une "puissance unipolaire englobant un partenariat stratégique entre l'Europe et l'Amérique." Les Etats-Unis et l'Alliance atlantique ont critiqué également la réunion de Bruxelles.

Selon l'éditorial de ce 1er mai du même El Pais, "en dépit de son caractère plutôt symbolique et peu substantiel, le mini-sommet militaire entre l'Allemagne, la France, la Belgique et le Luxembourg prolonge et accentue les désaccords avec les Etats-Unis et approfondit les différences au sein de l'Otan et de l'Union européenne elle-même".

El Mundo, pourtant très dur à l'égard de la participation espagnole à la guerre en Irak, où l'un de ses envoyés spéciaux fut tué, ne mâche pas ses mots contre le mini-sommet. Sous le titre "Défense européenne, oui, mais pas de quatre Européens", son éditorialiste écrit: "Ce qui est vraiment malheureux, c'est que seulement quatre pays, en outre les quatre situés du même côté de l'actuelle fracture politique au sein de l'Union européenne, s'arrogent la représentation communautaire. Avec de tels gestes, on ne referme pas les blessures, mais on approfondit la division".

Quant au grand journal catalan La Vanguardia, qui a milité aussi contre la guerre en Irak, son éditorial dédié au mini-sommet de Bruxelles s'intitule "La division continue". Son premier paragraphe donne le ton: "Bien que les mandataires des quatre pays réunis à Bruxelles... aient approuvé une série de propositions de défense commune européenne nullement rupturistes et ouvertes en principe au reste des pays membres de l'Union européenne, la simple tenue du mini-sommet visualise à nouveau la division qui s'est installée dans les chancelleries européennes à la suite à la guerre en Irak".

En ce qui concerne l'opinion publique espagnole, sa fureur contre le soutien de son gouvernement à la guerre en Irak semble tempérée par la rapide victoire des troupes américano-britanniques. Si, le mois dernier encore, des sondages indiquaient que 90% des Espagnols étaient hostiles à la guerre, d'autres sondages annoncent aujourd'hui que le Parti Populaire de José Maria Aznar pourrait à nouveau, l'an prochain, gagner les élections législatives...

Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum


  Accueil   |  Politique   |  Economie   |  Multimédia   |  Société   |  Pays+dossiers  
 

© LatinReporters.com - Amérique latine - Espagne
Le texte de cet article peut être reproduit s'il est attribué, avec lien, à LatinReporters.com