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Malgré son soutien à l'occupation de l'Irak, triomphe à Madrid du Parti Populaire (droite) à 5 mois des législatives

Espagne-élections: la droite musclée de José Maria Aznar affiche une santé peu commune en Europe

Promise par le PP, la suppression de l'impôt de succession entre parents et enfants et entre conjoints a contribué à faire d'Esperanza Aguirre la première femme présidente de la Région de Madrid (Affiche électorale)
par Christian Galloy

MADRID, lundi 27 octobre 2003 (LatinReporters.com) - La majorité absolue conquise à nouveau dimanche par le Parti Populaire (PP) au parlement de la Région de Madrid est un tremplin vers son maintien au pouvoir national aux législatives de mars 2004. Parmi les droites démocratiques européennes, la droite atlantiste forgée par le président du gouvernement espagnol, José Maria Aznar, est à la fois la plus musclée et celle qui affiche la meilleure santé, malgré son soutien d'abord à la guerre en Irak, puis à l'occupation actuelle de ce pays.

Avec 57 députés sur 111 et 48,45% des suffrages, le PP surpasse, tant en voix qu'en sièges, le cumul du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE, 45 élus, 38,96%) et des communistes de la Gauche unie (IU, 9 élus, 8,50%). Esperanza Aguirre, 51 ans, ex-présidente du Sénat et ex-ministre de l'Education, sera donc la première femme à gouverner les 5,5 millions d'habitants de ce qu'on appelle officiellement la Communauté de Madrid, la plus riche -avec la Catalogne- des 17 régions dites autonomes que compte aujourd'hui l'Espagne.

L'élection régionale de dimanche était une répétition de celle du 25 mai dernier, date à laquelle étaient convoquées d'autres scrutins régionaux et des élections municipales dans l'ensemble du pays. La perte de la Région de Madrid, le PP n'obtenant en mai que 55 élus contre 56 à une coalition post-électorale socialo-communiste, apparaissait alors comme l'unique revers d'importance du parti de José Maria Aznar. Mais la défection de deux élus socialistes, que le PP se refusa à capitaliser, rendit impossible la formation d'une majorité de gouvernement. Aussi une nouvelle élection des parlementaires régionaux madrilènes fut-elle convoquée pour le 26 octobre.

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Cinq mois après son revers du 25 mai, le PP s'est donc refait une santé régionale, reflet d'une étonnante santé nationale. Parmi les raisons de ce retournement figure l'impossibilité pour la gauche de prouver ses accusations de corruption immobilière, au profit du PP, pour expliquer la désertion des élus socialistes Teresa Saez et Eduardo Tamayo.

Ces derniers, en outre, ont profité de l'impact d'une commission parlementaire régionale d'enquête, dont les sessions étaient télévisées en direct, pour se justifier en accusant la tête de liste socialiste, Rafael Simancas, de s'être plié à trop d'exigences de son allié communiste. Avec à peine 7,7% des suffrages le 25 mai, IU aurait pu notamment, selon les deux dissidents, porter son influence sur l'ensemble des familles madrilènes en contrôlant le portefeuille régional de l'Education. Des électeurs centristes qui s'étaient laissés tenter par la gauche en ont eu froid dans le dos.

Et puis, en ce mois d'octobre s'est largement estompé l'impact négatif, sur de nombreux Espagnols, de l'appui inconditionnel de José Maria Aznar à l'invasion américaine de l'Irak, conclue dans sa phase militaire active en mai dernier. En dépit des attentats qui ensanglantent désormais ce pays arabe, les retombées de la guerre servent même le PP du président du gouvernement espagnol. Deux jours avant l'élection régionale madrilène de dimanche, José Maria Aznar se plaçait en effet au centre de l'attention politico-médiatique mondiale, inaugurant à Madrid, aux côtés de Kofi Annan, de Colin Powell et des ministres ou représentants de 73 pays et 20 organismes internationaux, la Conférence des donateurs pour la reconstruction de l'Irak.

Enfin, la veille même du scrutin madrilène, le président basque Juan José Ibarretxe remettait à son Parlement régional son projet de "libre association" avec l'Espagne, qualifié par le gouvernement espagnol de "plan de sécession". L'opposition ferme de José Maria Aznar et de ses ministres aux débordements du nationalisme basque a mobilisé derrière le PP l'électorat de droite et de centre droit, ainsi qu'un partie des votants de centre gauche, le patriotisme n'étant pas encore un vain mot en Espagne.

La gauche, elle, avec diverses nuances, s'oppose à l'indépendantisme basque, mais réclame un approfondissement des autonomies régionales. Cette attitude moins tranchée est peu rentable électoralement en dehors du Pays basque et de la Catalogne, deux régions parcourues par un puissant nationalisme.

Vers une troisième législature nationale


Le triomphe régional du PP à Madrid est un premier pas vers la victoire aux législatives de mars prochain. Depuis le retour à la démocratie, à partir de 1975 après 36 ans de franquisme, les électeurs madrilènes -originaires en fait de multiples régions- préfigurent habituellement  les grandes tendances du vote national.

Les derniers sondages prédisent tous que le PP pourrait conserver, en mars, le pouvoir pendant une troisième législature consécutive. A Madrid, c'est sa troisième majorité absolue qu'il vient d'engranger.

Ces prévisions et le résultat de Madrid reflètent d'autant mieux la vigueur du PP qu'ils sont postérieurs à la confirmation, par José Maria Aznar, de sa décision de ne plus briguer, au nom du renouvellement démocratique, un troisième mandat aux législatives de mars. Il a déjà cédé la présidence du PP à l'ex-ministre Mariano Rajoy. Ce dernier sera en mars le candidat du PP à la présidence du gouvernement. La victoire que vient de remporter Esperanza Aguirre à Madrid lui facilite la tâche.

Parmi les droites européennes, la droite espagnole est ainsi celle qui affiche la meilleure santé. Invité le 17 novembre 2002 à Paris au congrès fondateur de l'UMP (Union pour un mouvement populaire, parti gouvernemental français), José Maria Aznar, déjà considéré comme l'un des phares de la droite démocratique du Vieux Continent, saluait en ses pairs idéologiques de l'Hexagone leur "pari de l'unité des forces politiques du centre droit". La droite française n'en demeure pas moins compartimentée en chapelles indécelables au sein du PP aznarien.

Quoiqu'il se dise centriste, le parti gouvernemental espagnol incarne une droite sans complexe, néo-libérale, catholique traditionnelle, atlantiste et prônant contre le terrorisme international des actions militaires préventives dans le droit fil de la doctrine Bush et de la guerre en Irak.

Le 22 octobre dernier à Madrid, à l'Ecole supérieure des forces armées, devant les principaux responsables militaires espagnols et 141 candidats au généralat, José Maria Aznar déclarait: "Le sens de l'anticipation dans l'action est l'un des aspects du sens de la responsabilité d'un gouvernant. Je crois qu'il sera facile d'accepter qu'aucun responsable politique sensé ne puisse attendre passivement d'être épargné par des attentats effroyables... La lutte contre le terrorisme représentant une menace de destruction massive exige une nouvelle façon de comprendre la sécurité... L'efficacité de ce combat suppose d'entreprendre des actions de caractère anticipé, toutefois limitées à des cas déterminés...".

De nombreux adversaires de cette droite espagnole musclée, mais démocratique, lui reconnaissent deux atouts de poids: la durée du miracle économique qu'elle génère et l'étouffement de l'extrême droite xénophobe, à laquelle le PP, éventuellement sans le vouloir, ferme tous les espaces électoraux. Ni au Congrès espagnol des députés ni au Sénat ni dans aucun des 17 Parlements régionaux ne siège le moindre élu d'une extrême droite raciste si commune ailleurs en Europe.

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