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De 12 à 25 ans de prison: jugements sommaires après l'arrestation de 78 opposants

Dissidents condamnés à Cuba: Castro profiterait de la guerre en Irak pour accentuer la répression

Dernière heure

1.454 années de prison pour 75 dissidents

LA HAVANE, jeudi 10 avril 2003 (LatinReporters.com) - Le ministre cubain des Relations extérieures, Felipe Perez Roque, a déclaré mercredi soir à La Havane que 75 dissidents, qu'il a qualifiés de "mercenaires au service des Etats-Unis", ont été condamnés ces derniers jours à des peines comprises entre 6 et 28 années de prison à l'issue de 29 procès.

Les 75 condamnations totalisent 1.454 ans de prison. S'adressant à la presse, Felipe Perez Roque a accusé le chef de la Section des intérêts des Etats-Unis à La Havane, James Cason, de "nous avoir obligés à appliquer nos lois, sans autre alternative" pour avoir converti sa résidence en centre de réunion et "poste de commandement" de "contre-révolutionnaires".

Selon le chef de la diplomatie cubaine, "ce qui est jeu aujourd'hui à Cuba est de savoir si un petit pays peut être libre et indépendant aux côtés de la superpuissance hégémonique", qui aurait "l'obsession de fabriquer à Cuba une cinquième colonne, des groupes soi-disant d'opposition répondant à ses intérêts annexionnistes". Le ministre a estimé que l'hostilité des Etats-Unis à l'égard de Cuba s'est intensifiée depuis l'arrivée de George W. Bush à la Maison blanche.

Felipe Perez Roque a critiqué la réaction de l'Union européenne, qui a condamné la répression frappant actuellement les dissidents. Le ministre cubain s'en est pris particulièrement au "gouvernement espagnol, le moins habilité à parler de démocratie pour avoir entraîné son pays dans une guerre (en Irak) à laquelle s'opposent 91% des Espagnols".

Parmi les condamnés, on dénombre 28 journalistes indépendants et de nombreux militants du Projet Varela de démocratisation de Cuba. (Voir aussi article ci-contre). L'un d'eux, Luis Enrique Ferrer Garcia, membre aussi du Mouvement chrétien de libération, a écopé de la peine la plus sévère, 28 ans de prison.

L'Institut internationale de presse (IPI) estime que la vague de condamnations vise "à réduire une fois pour toutes au silence la voix critique des dissidents au moment où l'attention mondiale est concentrée sur la guerre en Irak".

LA HAVANE, mardi 8 avril 2003 (latinreporters.com) - Au moins 33 des 78 dissidents anticastristes arrêtés à Cuba en mars dernier ont été condamnés hier a des peines de 12 à 25 ans de prison. Prononcées à l'issue de jugements sommaires, ces sentences frappent notamment le poète et journaliste indépendant Raul Rivero et Hector Palacios, promoteur du Projet Varela de démocratisation du régime cubain.

Pour accentuer soudain la répression politique, la plus sévère depuis dix ans, le président Fidel Castro aurait, selon les milieux dissidents, misé sur l'éloignement de l'attention médiatique mondiale, monopolisée par la guerre en Irak, et sur la vague d'antiaméricanisme que cette guerre provoque.

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La rafle contre les 78 dissidents fut menée du 18 au 21 mars, soit en pleine effervescence mondiale due à l'Irak, Bagdad étant bombardée dès le 20 mars. "Le gouvernement cubain est très pressé d'en finir" pour que les procès des opposants restent "du début à la fin dans le cadre de la guerre en Irak" afin de réduire l'impact international de cette vague de répression a déclaré à l'Agence France Presse Elizardo Sanchez, président de la Commission cubaine des droits de l'homme et de la réconciliation nationale.

Selon lui, 33 premières sentences ont été prononcées lundi dans toute l'île à l'encontre des 78 opposants arrêtés. Ils peuvent théoriquement interjeter, dans un délai de 72 heures, un appel dont l'aboutissement est incertain. On attend d'autres condamnations au cours de la semaine.

Onze témoins, connus comme des membres de la dissidence, se sont présentés à la barre en reconnaissant être des agents de la sécurité de l'Etat, infiltrés dans les mouvements d'opposition. Deux dissidents réputés que l'on croyait journalistes, Nestor Baguer et Manuel David Orrio, comparaissant en qualité de témoins à charge, révélèrent ainsi leur appartenance à la police secrète.

Raul Rivero, 57 ans, est condamné à 20 ans de prison. Il est notamment le fondateur de l'agence de presse dissidente Cuba Press et le vice-président régional de la Commission de liberté de presse et d'information de la Société interaméricaine de presse (SIP). Le procureur a retenu contre Raul Rivero ses "articles subversifs" visant à "discréditer" les institutions cubaines et il l'a accusé de collaborer avec l'association Reporters sans frontières (RSF) , ainsi qu'avec Radio Marti, station financée par Washington et dont les émissions sont destinées à Cuba.

Pour "atteinte à la sécurité de l'Etat", c'est une peine de 25 ans d'emprisonnement qui frappe Hector Palacios, âgé de 62 ans. Il est l'un des promoteurs du Projet Varela, qui avait abouti, le 10 mai 2002, à la remise au Parlement d'une pétition signée par 11.020 Cubains réclamant un référendum sur la démocratisation via des élections libres. A l'époque, la Constitution déclarait admissible un référendum proposé par au moins 10.000 citoyens. Mais Fidel Castro enterra cet espoir deux mois plus tard par une révision constitutionnelle établissant le caractère "irrévocable" du socialisme cubain.

Osvaldo Alfonso, membre comme Hector Palacios du mouvement illégal Todos Unidos (Tous Unis), écope, lui, de 18 ans de prison. Egalement figure de proue de la dissidence, l'économiste Marta Beatriz Roque se voit infliger une peine de 20 ans.

Parmi les autres condamnés figurent notamment Ricardo Gonzalez Alfonso (20 ans de prison), Oscar Espinosa Chepe (20 ans), Marcelo Lopez (18 ans), Marcelo Cano (15 ans), Efren Fernandez (12 ans), Regis Iglesias (18 ans), Antonio Diaz Sanchez (20 ans) et Roberto Miranda (20 ans).

Plusieurs d'entre eux avaient également appuyé le Projet Varela, mais son principal promoteur, Oswaldo Paya, est momentanément épargné. Il le doit peut-être au prix Sakharov que lui avait décerné l'an dernier le Parlement européen. Leader du Mouvement chrétien de libération, Oswaldo Paya qualifie de "démesurées" des condamnations "qui n'auraient jamais dû être prononcées" et il promet de poursuivre sa lutte en faveur des droits de l'homme.

L'accusation collective de "complot contre-révolutionnaire" sous la houlette de la représentation des Etats-Unis à La Havane a été lancée contre les 78 dissidents arrêtés. Ces derniers tombent sous le coup de la Loi de protection de l'indépendance nationale, dénommée "loi bâillon". Elle punit sévèrement la collaboration avec des médias non officiels, l'acceptation de rétributions ou de dons non autorisés par le gouvernement, la possession ou la distribution de "matériel subversif", ainsi que la perturbation de l'ordre public par des manifestations dissidentes.

Fidel Castro lui-même, d'une voix très éraillée par l'âge -il aura 77 ans le 13 août- a fustigé à la télévision les détenus, qui auraient "trahi la patrie en se mettant au service d'une puissance étrangère".

Reporters sans frontières (RSF) demande à l'Union européenne de "geler l'examen de la candidature cubaine aux accords de Cotonou" tant que les journalistes dissidents arrêtés ne seront pas libérés. Les accords de Cotonou permettent à l'Union européenne d'octroyer à des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique une aide économique et un régime de préférence commerciale.

La Commission européenne elle-même a annoncé sa "prise en considération" de la répression en cours avant de se prononcer sur la candidature de Cuba aux accords de Cotonou. L'Union européenne, le gouvernement des Etats-Unis et plusieurs organisations internationales avaient déjà réclamé la libération des dissidents quelques jours après leur arrestation.

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