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Méthodes qualifiées de nazies et mafieuses visant à gagner un référendum sur l'autodétermination

Espagne: les indépendantistes basques accusés de "nettoyage ethnique"

par Christian Galloy

PAYS BASQUE
100.000 manifestants
contre le "nationalisme
obligatoire"

SAINT-SEBASTIEN, samedi 19 octobre 2002 (latinreporters.com) - L'une des plus imposantes manifestations vues au Pays basque depuis la fin de la dictature franquiste (1975) a réuni "contre le nationalisme obligatoire", samedi à Saint-Sébastien, quelque 100.000 personnes selon la police municipale (150.000 selon les organisateurs).

La manifestation était dirigée tant contre le terrorisme des commandos séparatistes basques de l'ETA que contre la prétention des nationalistes dits modérés, qui contrôlent l'exécutif régional, de convoquer avant 2005 un référendum d'autodétermination pour réduire les liens du Pays basque avec l'Espagne à un "pacte de libre association".

Comparable à la tentative souverainiste des Canadiens francophones du Québec, ce projet de "libre association" est assimilé par les éditorialistes madrilènes à un saut vers l'indépendance. Le gouvernement espagnol en dénonce le caractère anticonstitutionnel.

Organisée par l'association "Basta ya" (Ça suffit!) du philosophe Fernando Savater, la manifestation de Saint-Sébastien, colorée par des drapeaux espagnols, basques et européens, était précédée d'une banderole portant le slogan : "Oui à la Constitution et au statut, non au nationalisme obligatoire".

Cela signifie que les Basques non nationalistes, qui totalisaient 47,5% des suffrages aux élections régionales de 2001, veulent demeurer dans le cadre de la Constitution espagnole et du statut d'autonomie régionale - l'un des plus larges au niveau européen- dont jouit le Pays basque depuis 1980. Ils s'opposent par contre à ce que le manifeste lu à la clôture de la manifestation qualifie d'alternative entre "nationalisme obligatoire ou condamnation à mort".

Des professeurs d'université, des journalistes et des élus politiques conservateurs et socialistes menacés de mort par l'ETA, ainsi que des proches des centaines de victimes de l'organisation séparatiste participaient au rassemblement de Saint-Sébastien pour rappeler qu'au Pays basque le terrorisme ne vise que les non nationalistes et que cette menace permanente d'exécution sans jugement est mise à profit par les nationalistes dits modérés lorsqu'ils prétendent pouvoir pacifier les violents en échange de l'indépendance ou presque.

Ne pouvant assister à la manifestation, mais se solidarisant sur les ondes de la Radio nationale, le secrétaire général du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), José Luis Rodriguez Zapatero, déclarait samedi que "le Pays basque n'est pas en Espagne, c'est l'Espagne".

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MADRID, vendredi 18 octobre 2002 (latinreporters.com) - L'accusation de "nettoyage ethnique", défini comme "crime contre l'humanité", est portée par le célèbre juge espagnol Baltasar Garzon contre les indépendantistes basques de l'ETA (extrême gauche) et leur bras politique, le parti Batasuna.

Leurs attentats et leurs menaces obligent en effet des milliers de non nationalistes à fuir les provinces basques. Initiateur des poursuites internationales contre l'ex-dictateur chilien Augusto Pinochet, le juge Garzon croit que ce "nettoyage ethnique", qu'il compare aux méthodes nazies et de la mafia, viserait à "assurer un résultat affirmatif" lors d'un éventuel référendum sur l'autodétermination du Pays basque.

La convocation "avant la fin de la législature" régionale (en principe 2005) d'un tel référendum, que Madrid estime anticonstitutionnel, a été annoncée en septembre par le lehendakari (président) basque, Juan José Ibarretxe. Le lehendakari appartient au PNV (Parti nationaliste basque, démocrate-chrétien), hostile à la violence, mais partisan d'un "pacte de libre association" qui ferait du Pays basque un associé souverain de l'Espagne.

A Madrid, tant le gouvernement conservateur espagnol de José Maria Aznar que l'opposition socialiste affirment que la prétention d'organiser un référendum sur l'autodétermination unit désormais politiquement séparatistes radicaux et nationalistes dits modérés, les seconds utilisant indirectement la violence des premiers comme "levier" politique. M. Aznar a accusé Juan José Ibarretxe et le PNV de "découvrir l'Europe des Balkans" et a averti que Madrid utilisera la loi et la Constitution espagnoles, ainsi que les instances de l'Union européenne, pour empêcher cette aventure.

Dans une ordonnance adressée cette semaine à la police et à la garde civile, le juge Garzon leur demande d'élaborer "un rapport exhaustif", avec l'appui d'organismes nationaux, régionaux, syndicaux, patronaux et sociaux, illustrant la discrimination et les atteintes aux libertés découlant au Pays basque de l'activité de l'ETA et du parti Batasuna.

Batasuna a été suspendu judiciairement en août dernier pour au moins trois ans en fonction de son appartenance supposée au conglomérat terroriste dirigé par les commandos séparatistes armés de l'ETA, dont les attentats ont fait 837 morts et 2.372 blessés depuis 1968. L'Union européenne et les Etats-Unis ont inscrit l'ETA sur leur catalogue respectif des organisations terroristes.

L'évolution des listes d'électeurs, les inscriptions dans les registres de naissances, les refus de subventions municipales (Batasuna contrôle 62 mairies) et un relevé des attentats, agressions ou menaces ayant visé au Pays basque des élus politiques, des professeurs, des journalistes, des chefs d'entreprise, des syndicalistes et des membres d'associations opposées à la violence indépendantiste intéressent particulièrement le juge Garzon.

"Crime contre l'humanité"

Avec ces informations, le magistrat tentera de démontrer que le Pays basque est victime de ce qu'il appelle "un authentique nettoyage ethnique de basse intensité" visant "à prédéterminer en fonction d'une certaine tendance idéologique la composition du corps électoral... et assurer ainsi le résultat affirmatif d'un éventuel référendum d'autodétermination".

Baltasar Garzon assure dans son ordonnance que, "depuis des décades", le Pays basque souffre "du maintien systématique d'un climat de pression et d'intimidation tendant à obtenir non seulement une hégémonie politique du nationalisme extrémiste sur tout le territoire, mais aussi une ségrégation du secteur non nationaliste de la population pour lui rendre insupportable son maintien dans ce territoire".

Le juge explique que "la ségrégation d'une partie de la population en raison de son origine ethnique ou géographique ou de son idéologie présumée est inadmissible dans un Etat de droit et constitue en outre un délit pénal et même un crime contre l'humanité".

"Batasuna, poursuit-il, emploie au Pays basque les mêmes méthodes d'intimidation contre l'ensemble de la société que celles utilisées en Sicile par le crime organisé... L'expression d'une différence, la contestation et la réponse des citoyens sont absolument proscrites et lorsqu'elles se produisent elles sont immédiatement contrecarrées par l'agression et le harcèlement des contestataires".

Après cette référence à la mafia, le juge Garzon évoque aussi les méthodes nazies, accusant Batasuna "d'avoir obtenu ses résultats électoraux avec des méthodes similaires à celles utilisées par le Parti national socialiste allemand sous la République de Weimar".

Aux dernières élections régionales basques, en mai 2001, Batasuna avait récolté 143.139 voix, soit 10,12% des suffrages exprimés. Ce pourcentage signifiait un recul important du bras politique de l'ETA par rapport à son score historique de 17,91%, aux élections régionales de 1998.

La somme des suffrages obtenus par les nationalistes dits modérés et les indépendantistes radicaux représentait en 2001 la majorité absolue (52,5%) des électeurs basques s'étant rendus aux urnes. Des organisations pacifistes estiment qu'environ 200.000 habitants du Pays basque, soit 10% de sa population, auraient quitté la région au cours des vingt-cinq dernières années, fuyant les attentats, les menaces, les pressions et les vexations qui y frappent les "espagnolistes".

Par la voix du philosophe et écrivain Fernando Savater, l'association "Basta ya" (Ça suffit!) a appelé ces exilés à revenir en masse ce samedi au Pays basque pour y manifester, à Saint-Sébastien, "contre le nationalisme obligatoire".

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Réaction de Jakes Etcheverry, internaute basque

"Garzon accuse les Basques de crime contre l'humanité, alors qu'il s'agit pour lui de défendre le nationalisme espagnol contre le droit d'autodétermination du peuple basque. Depuis le paléolithique, les Basques vivent en Euskal herria, vaincus militairement à plusieurs reprises, dernièrement face au franquisme, et on  leur a imposé un régime politique sous la menace d'une intervention militaire (Constitution espagnole). C'est l'article 1514 de l'ONU qu'il faut relire, pour être objectif.

Je trouvais bien votre site, car il parlait du droit des peuples autochtones à l'autodétermination.  Les luttes de libération nationale parfois utilisent la violence, c'est regrettable pour tous .

Le problème est de savoir si les droits des peuples autochtones seront respectés et non pas de relayer  les allégations infondées d'un juge directement issu du régime franquiste.

L'affaire Pinochet ne l'exonère pas de la torture dénoncée dans son bureau par les personnes incriminées d'actes de terrorisme, torture constatée par les organisations internationales. Ne pas mettre les deux informations en parallèle ne permet pas de se faire une opinion réelle sur le juge Garzon. Voilà en ce qui concerne le manque de crédibilité. En dehors de cela, il est très bien votre site."


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