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TRÉSOR DU XIIe SIÈCLE DÉROBÉ À SAINT-JACQUES-DE-COMPOSTELLE
Le vol du Codex Calixtinus blesse l'Espagne, la chrétienté et la culture
Pages du Codex Calixtinus. La disparition de ce manuscrit sur parchemin de 225 folios recto-verso a été dénoncée le 6 juillet 2011. (Source photo : http://www.library.miami.edu/musiclib/facsimile/calix.html)
MADRID, vendredi 8 juillet 2011 (LatinReporters.com) - "Le Codex Calixtinus vaut 30, 40, 100 millions d'euros... En fait, c'est incalculable" estime Manuel Mandianes, expert du Conseil supérieur de la recherche scientifique. Comme la mairie de Saint-Jacques-de-Compostelle, il croit que la disparition de la cathédrale de la ville de ce manuscrit du 12e siècle, l'un des plus précieux au monde, est le résultat d'un vol. L'Espagne a alerté Interpol.

Constatée le 5 juillet, la disparition était dénoncée le lendemain. Le célèbre manuscrit "était habituellement entreposé dans une salle de la cathédrale à laquelle n'ont accès qu'une demi-douzaine de personnes" a expliqué la porte-parole de la police. Il n'était présenté au public qu'en des "moments exceptionnels, comme la visite du pape". Ce fut le cas le 6 novembre 2010, lorsque Benoît XVI était reçu à Saint-Jacques-de-Compostelle (en espagnol, Santiago de Compostela), capitale régionale de la Galice, au nord-ouest de l'Espagne.

Curieusement, la porte de la chambre forte qui contenait le Codex Calixtinus n'a pas été forcée. "Un vol de cinéma" a commenté à la télévision publique espagnole Manuel Mandianes. Il y voit la main d'une "bande organisée", peut-être à la solde d'un amateur richissime, mu par la soif de "jouissance personnelle" d'un ouvrage non commercialisable.

Un codex est un manuscrit à pages multiples reliées et pourvu d'une couverture. Celui disparu de la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle est dénommé Codex Calixtinus pour son attribution (apocryphe?) au pape Calixte II, mort en 1124. Rédigé en latin, il comporte 225 folios recto-verso en parchemin, c'est-à-dire en peau d'animal préparée spécialement pour l'écriture. Il est incorrect de le qualifier d'incunable, puisque ce terme désigne les premiers livres imprimés (et donc non manuscrits) de la seconde moitié du 15e siècle.

Chant médiéval dont les notes et paroles sont manuscrites dans le Codex Calixtinus.
Le Codex Calixtinus est un joyau à la fois historique, littéraire, pictural, liturgique et musical, un trésor inestimable du patrimoine culturel et religieux de l'Espagne, de la France (l'ouvrage doit beaucoup aux moines clunisiens) et sans doute de l'Europe, puisque des pèlerins du Vieux continent honorent depuis près d'un millénaire les restes supposés de l'apôtre Santiago (Saint Jacques) qu'abriterait la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle. Cette ville galicienne était considérée au Moyen Age comme le troisième lieu saint du catholicisme, après Rome et Jérusalem.

Joyau musical? Oui, car plus de la première moitié du Codex Calixtinus est, aux côtés de sermons, un recueil, avec notes et paroles, de chants liturgiques et de chants de pèlerins, précieux pour la connaissance de la musique médiévale. La plupart de ces pièces reprennent des mélodies grégoriennes en y adaptant un texte à la gloire de l'apôtre Saint Jacques.

La description de miracles attribués à l'apôtre, le rôle supposé de Charlemagne et de son chevalier Roland dans l'ouverture des chemins de Santiago et même un premier "guide" du pèlerin, avec mention de bonnes et mauvaises tables, de lieux à visiter ou à éviter et d'étapes suggérées sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle font du Codex Calixtinus un témoignage incomparable de la foi, des légendes et des réalités quotidiennes médiévales. L'esthétique de l'ouvrage, de sa calligraphie, de ses illustrations, le valorisent aussi énormément.

"Le Codex Calixtinus, joyau du Moyen Age, volé à Santiago" titre ce 8 juillet sur trois colonnes à la une l'influent quotidien madrilène El Pais. "L'histoire se répète : de graves carences des systèmes de sécurité des oeuvres d'art ont à nouveau comme conséquence le vol d'une perle unique du patrimoine espagnol" se lamente le journal. Il relève en outre que le manuscrit n'était pas assuré.

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