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L'opposition compte en recueillir à nouveau plusieurs millions le 5 octobre

Venezuela: invalidation des signatures pour un référendum contre le président Chavez

Une éventuelle interdiction du référendum révocatoire serait explosive

Le Président Hugo Chavez ne "bougera pas le petit doigt pour ce référendum"
Photo Norma Domínguez
CARACAS, samedi 13 septembre 2003 (LatinReporters.com) - Le Conseil national électoral (CNE) du Venezuela a invalidé vendredi les plus de trois millions de signatures déposées le 20 août par l'opposition pour la convocation d'un référendum visant à révoquer le président Hugo Chavez. La Constitution bolivarienne de 1999 a introduit le référendum révocatoire d'initiative populaire contre tout fonctionnaire public, y compris le président de la République.

Le CNE va en définir les normes légales, jusqu'à présent inexistantes. L'opposition a accepté l'invalidation en annonçant une campagne pour recueillir à nouveau la signature de millions d'antichavistes, dans le respect des normes qu'édictera le CNE.

Malgré la joie démonstrative de milliers de partisans du président Chavez, qui brandissaient vendredi soir à Caracas des pancartes clamant "Non au référendum", la décision du CNE relève du bon sens plutôt que de la confrontation. Les signatures emmagasinées par l'opposition pour dénoncer notamment la "cubanisation" que Chavez implanterait au Venezuela ne visaient pas nécessairement toutes à la convocation du référendum révocatoire. En outre, les critères d'identification des signataires n'étaient pas stricts et le soupçon de fraudes existait. Le CNE va donc définir ces critères.

Dans plusieurs pays de l'Union européenne aussi, lorsqu'un nombre déterminé de citoyens doit avaliser, par exemple, la participation à une élection d'un parti ou d'un candidat, seuls des formulaires officiels mentionnant un but et des dates précises peuvent être utilisés afin que la bonne foi des signataires ne soit pas détournée à d'autres fins.

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Constitutionnellement, le référendum révocatoire ne peut être convoqué qu'à partir de la seconde moitié du mandat du fonctionnaire visé. En ce qui concerne Hugo Chavez, son mandat présidentiel de six ans est arrivé à mi-parcours le 19 août dernier. La Coordination démocratique, qui regroupe les multiples factions d'opposition, avait déposé dès le lendemain de cette échéance 3,2 millions de signatures, soit 800.000 de plus que les 2,4 millions (20% des électeurs inscrits) nécessaires. Mais ces signatures furent recueillies le 2 février, en un seul jour baptisé "Firmazo". ("Firmar" signifie signer).

C'était plus de six mois trop tôt estime le président du CNE, Francisco Carrasquero. Il relève en outre des "erreurs conceptuelles et formelles" contribuant aussi à l'invalidation des signatures, notamment leur recueil en dehors de toute procédure légalement établie.

Dans son ordonnance d'invalidation, le CNE annonce qu'il rendra public dès ce prochain lundi 15 septembre "le projet de normes" devant régir les référendums révocatoires. Deux jours plus tard, il devrait l'approuver et c'est alors seulement, à partir du 17 septembre, que les Vénézuéliens pourront exercer légalement leur droit à recueillir des signatures pour convoquer des référendums de ce type.

L'un des leaders de la Coordination démocratique, Enrique Mendoza, a annoncé qu'une nouvelle journée de recueil massif de signatures, baptisée le "Reafirmazo", sera organisée le 5 octobre, dans le respect des nouvelles normes officielles, pour tenter d'obtenir par les urnes la révocation de Hugo Chavez.

Le vice-président Rangel jette de l'huile sur le feu

Mais le vice-président de la République, José Vicente Rangel, a jeté de l'huile sur le feu en affirmant que le Tribunal suprême aurait à se prononcer sur la légalité du "Reafirmazo". Des partisans du chef de l'Etat avancent en effet que la Constitution n'autorise les opposants à ne recourir qu'une seule fois au cours du mandat présidentiel au référendum révocatoire contre le président et qu'en conséquence une nouvelle campagne de signatures serait illégale. Cette interprétation spécieuse, car l'opposition n'était pas responsable de l'absence de normes légales, pourrait conduire tout droit le Venezuela à la guerre civile.

Même le président Chavez ne semblait pas aussi extrémiste -avant, il est vrai, l'invalidation prononcée par le CNE- dans l'interview mise en ligne le 31 août dernier par LatinReporters.com. Il nous déclarait alors ne pas vouloir "bouger le petit doigt pour que ce référendum ait lieu". ("Yo no voy a mover una paja...", soit, littéralement: "Je ne bougerai pas un brin de paille..."). Il ajoutait que les signatures déposées par l'opposition "sont clairement illégales, car non recueillies selon les procédés constitutionnels". Mais il admettait implicitement qu'un référendum révocatoire serait possible si l'opposition suivait une procédure légale, estimant que "de toute façon, je ne crois pas qu'il (le référendum) puisse se faire en 2003, car la fin de l'année est au coin de la rue et il faudrait encore accomplir de nombreuses formalités pour valider les signatures, les vérifier, etc.".

Le Conseil national électoral aura tardé à doter le référendum révocatoire d'un corset légal. Mais à la décharge de son nouveau président, Francisco Carrasquero, dont la nomination avait été bien accueillie tant par le gouvernement que par l'opposition, il faut rappeler que les disputes partisanes qui ont longtemps déchiré le CNE l'empêchaient d'exercer son rôle d'arbitre électoral.

L'installation du nouveau CNE ne fut effective que le 27 août. Elle est le fruit d'un accord obtenu le 29 mai dernier entre le gouvernement et l'opposition, avec l'aval de l'Organisation des Etats américains (OEA), des Nations unies, du Centre Carter et du "Groupe des amis du Venezuela", qui comprend l'Espagne, le Portugal, le Brésil, le Chili, le Mexique et... les Etats-Unis (dont Hugo Chavez n'est pas vraiment l'un des intimes).

Ces instances internationales voient d'un bon oeil la convocation d'un référendum révocatoire, estimant qu'un verdict des urnes serait le moyen le plus démocratique de refroidir la chaudière vénézuélienne. Celle-ci faillit éclater lors du putsch manqué d'avril 2002 et de la grève générale de décembre et janvier derniers, qui affecta surtout la production et l'exportation de pétrole. La Banque centrale du Venezuela indique que le produit intérieur brut a chuté de 18,5%  au cours du premier semestre par rapport à la même période de 2002, qui avait elle-même enregistré une baisse de 7,1%. Selon le ministère des Finances, la paralysie du secteur pétrolier coûta à elle seule au Venezuela dix milliards de dollars.

Le conflit vénézuélien s'alimente, d'une part, du coup de barre à gauche imprimé à la politique nationale et internationale du Venezuela par le président Chavez, ouvertement antiaméricain et procastriste, et, d'autre part, de l'incapacité d'une opposition fractionnée, mais soutenue par les médias et les milieux économiques, à trouver un leader charismatique proposant une solution globale aux problèmes réels (mais négociables) du pays.

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