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Après l'acquittement de quatre officiers impliqués dans le coup d'Etat du 11 avril

Venezuela: guerre du président Chavez à la Justice qui attribue à son régime la tuerie d'avril

Hugo Chavez accusé de financement illégal de son parti par une banque espagnole

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Dossier Venezuela

CARACAS, dimanche 18 août 2002 (LatinReporters.com) - Balayant le principe d'indépendance du pouvoir judiciaire, le président vénézuélien Hugo Chavez a annoncé publiquement samedi la "contre-attaque" de son gouvernement et du peuple contre le Tribunal suprême, qui a acquitté quatre officiers supérieurs impliqués dans le coup d'Etat du 11 avril dernier. La sentence a en outre attribué à des "cercles officialistes" le massacre de civils perpétré à la même date.

L'offensive du président Chavez pour reprendre le contrôle du Tribunal suprême pourrait, parmi d'autres conséquences, étouffer la plainte déposée contre le chef de l'Etat pour financement illégal de son parti par une banque espagnole.

Lors d'un acte officiel dans le quartier populaire d'El Valle, au nord-ouest de Caracas, Hugo Chavez a vivement critiqué les onze magistrats du Tribunal suprême qui rejetèrent (contre huit abstentions), mercredi dernier, l'ouverture d'un procès pour "rébellion militaire" contre le vice-amiral Hector Ramirez, le général de l'armée de terre Efrain Vasquez, le vice-amiral Daniel Comisso et le général d'aviation Pedro Pereira.

Des milliers de "chavistes" manifestèrent violemment à Caracas contre la sentence. Des affrontements avec la garde nationale, qui protégeait l'édifice du Tribunal suprême, firent une quinzaine de blessés, dont deux par balles.

"Nous n'allons pas en rester là. C'est l'heure maintenant d'une contre-attaque du peuple et des véritables institutions, une contre-attaque révolutionnaire" s'est exclamé le président Chavez, un populiste de gauche dont le mandat s'étend jusqu'en 2006. Il fut évincé du pouvoir le 11 avril pendant 48 heures, lors d'un putsch et d'un contre-putsch marqués par des volte-face de chefs militaires et des manifestations massives d'adversaires et de partisans du chef de l'Etat. On dénombra alors plus de 50 morts et des centaines de blessés à Caracas.

"Ces onze magistrats n'ont pas la morale nécessaire à la prise d'une quelconque autre décision. Ce sont des immoraux qui devraient publier un livre avec leur visage pour que le peuple les connaisse" a poursuivi Hugo Chavez.

Chargeant l'Assemblée nationale de la responsabilité de destituer ces "immoraux", le président Chavez a précisé que la "contre-attaque révolutionnaire" débutera par le réexamen, au Parlement, de la désignation des 11 magistrats dont il réclame la révocation. Le 20 novembre 2000, la majorité "chaviste" de l'Assemblée nationale avait approuvé la nomination des membres du Tribunal suprême. La réouverture en cours de leur dossier, pour contrôler s'ils remplissent toutes les conditions exigées par la loi, n'avait pas été jugée utile aussi longtemps que leurs sentences allaient dans le sens souhaité par le pouvoir.

Hugo Chavez a invité ses partisans à manifester dans la rue, le 24 août, contre la sentence "grossière"  et "monstrueuse" du Tribunal suprême, qui a "souillé" la justice vénézuélienne.

Le chef de l'Etat et ses partisans avaient estimé précédemment qu'en refusant de poursuivre les quatre officiers supérieurs accusés de rébellion, le Tribunal suprême avait nié l'existence même, en avril, d'un coup d'Etat pourtant dénoncé par la communauté internationale et notamment par l'Organisation des Etats américains. Le pouvoir "chaviste" a suggéré que les onze magistrats incriminés par Hugo Chavez pourraient avoir été soudoyés par des adversaires du régime.

La sentence du Tribunal suprême a blanchi les quatre officiers en argumentant que leurs actes, en avril, visèrent à maintenir l'ordre après l'annonce de la démission du président Chavez par le chef des forces armées, le général Lucas Rincon. (Cette démission sera démentie par la suite par Hugo Chavez).

En outre, c'est à des "cercles officialistes" que la sentence attribue "le génocide perpétré contre la société civile sans défense" le 11 avril dernier. Il s'agit d'une mise en cause à peine voilée des Cercles bolivariens créés par le président Chavez à l'image des Comités communistes cubains de défense de la révolution.

Lors d'une manifestation massive contre le régime de Hugo Chavez, le 11 avril, des francs-tireurs avaient abattu 18 personnes et fait plusieurs dizaines de blessés, tant parmi les manifestants que parmi des contre-manifestants "chavistes". Ce massacre fut le point de départ des événements qui écartèrent brièvement du pouvoir Hugo Chavez, remplacé pendant 48 heures par le chef d'entreprise Pedro Carmona, actuellement en exil après sa fuite via l'ambassade de Colombie.

C'est la première fois que le pouvoir judiciaire vénézuélien se prononce sur la responsabilité de la tuerie du 11 avril. L'indépendance soudaine du Tribunal suprême préoccupe d'autant plus le régime "chaviste" que diverses plaintes visant le président Chavez pourraient théoriquement, si elles aboutissaient, entraîner sa destitution.

La plainte la plus étayée a été déposée par l'avocat Tulio Hermosilla contre le président Chavez pour financement illégal de son parti, le Mouvement Vème République (MVR).

En Espagne, des administrateurs du Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA), deuxième banque espagnole, ont reconnu avoir versé en 1998 et 1999 un total d'un million et demi de dollars pour financer les campagnes électorales du MVR de Hugo Chavez. La loi vénézuélienne interdit ce type de financement par des sociétés domiciliées à l'étranger. L'occultation de ses versements en faveur du MVR met en outre la BBVA sous le coup de la loi espagnole.

A Madrid, l'affaire est instruite par le célèbre juge Baltasar Garzon, initiateur des poursuites internationales contre l'ex-dictateur chilien Augusto Pinochet et candidat actuel au Prix Nobel de la paix pour sa contribution à l'internationalisation de la justice et des droits de l'homme.

La récupération du contrôle du Tribunal suprême pourrait permettre au pouvoir "chaviste" d'étouffer juridiquement les conséquences de ce scandale au Venezuela. Mais, politiquement, le financement occulte d'une grande banque internationale nuira à la popularité du président Chavez, qui cultive une image de défenseur des pauvres et d'adversaire de la globalisation.

De nombreux observateurs estiment que la forte polarisation qui continue à séparer adversaires et partisans de Hugo Chavez pourrait à tout moment provoquer de nouveaux événements dramatiques.

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