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Le parti présidentiel perd Caracas, Maracaïbo et plusieurs Etats
Venezuela-élections: Chavez gagne, mais l'opposition progresse au scrutin régional et municipal

Hugo Chavez - Photo Marcelo Garcia
Hugo Chavez (bras levé) au quartier général électoral de son Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV): "Il s'agit maintenant d'approfondir, d'étendre le socialisme bolivarien" - Photo Marcelo Garcia, Prensa Presidencial.

CARACAS, lundi 24 novembre 2008 (LatinReporters.com) - Vainqueur dans 17 des 22 Etats en jeu, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV) du président Hugo Chavez a remporté le 23 novembre les élections régionales et municipales. Un an après sa défaite au référendum sur la révision de la Constitution, le chef de l'Etat leur conférait valeur de plébiscite sur sa personne et sa révolution dite bolivarienne, qu'il estime aujourd'hui "ratifiée" par les urnes. Néanmoins, en progrès par rapport à 2004, l'opposition contrôlera notamment la capitale, Caracas, et 5 Etats au lieu de 2, dont ceux de Zulia et Miranda, les plus importants du pays.

"C'est l'avenir de la révolution qui est en jeu, l'avenir du socialisme, du Venezuela, du gouvernement révolutionnaire et de Hugo Chavez" clamait le président lors de la campagne électorale qu'il mena de bout en bout pour épauler ses candidats. Après l'annonce des résultats, le chef de l'Etat soulignait la "participation historique" (65,45%) à ce type d'élections et tirait cette leçon du scrutin: "Il faut féliciter le pays pour le grand triomphe du Venezuela, le grand triomphe de la Constitution, le grand triomphe de la démocratie bolivarienne, le grand triomphe du système politique en vigueur au Venezuela (...) La construction du socialisme bolivarien est ratifiée. Il s'agit maintenant de l'approfondir, de l'étendre".

"Qui pourrait dire maintenant qu'il y a une dictature au Venezuela?!" s'exclamait encore Hugo Chavez en félicitant aussi les candidats victorieux de l'opposition, les invitant dans la foulée à respecter la Constitution et l'autorité du chef de l'Etat.

A l'hôtel Alba Caracas, quartier général électoral du PSUV présidentiel, seuls Hugo Chavez et ses déclarations remontaient l'ambiance. "Je ne parviens pas à y croire" se lamentaient des chavistes à propos de la perte de la mairie dite majeure de Caracas [NDLR.: celle qui coordonne les cinq municipalités de la capitale]. Pas le moindre défilé du PSUV dans les rues de cette métropole de cinq millions d'habitants. On y entendait par contre des militants de l'opposition crier "Si se puede", version espagnole du "Yes we can" (Oui nous le pouvons) de Barack Obama, le premier noir élu à la présidence des Etats-Unis.

"Gagner Caracas est très impressionnant. Cela donne à l'opposition quelque chose à fêter et Chavez va devoir se creuser les méninges pour vendre l'idée qu'il n'y a pas d'alternative à son projet" estime Luis Vicente Leon, directeur de l'institut de sondages Datanalisis. Selon lui, "les résultats sont sensationnels pour l'opposition". Une appréciation sans doute excessive, compte tenu de l'étonnante résistance de Hugo Chavez à l'usure du pouvoir qu'il détient depuis dix ans. Elu pour la première fois à la présidence en décembre 1998, le paladin du "socialisme du 21e siècle" et ses disciples sont sortis victorieux de onze confrontations électorales sur un total de douze. Le scrutin dans le Barinas, Etat natal de Chavez, symbolise cette longévité. Adan Chavez, frère de Hugo, vient d'y être élu gouverneur, prenant la relève de leur père, qui dirigeait le Barinas depuis dix ans.

Mais il est vrai que des victoires remportées le 23 novembre par une opposition plus unie qu'autrefois ont une forte valeur symbolique et donc politique. Outre la capitale, la seconde ville du pays, Maracaïbo, passe également aux mains des adversaires de Hugo Chavez et même du premier d'entre eux, Manuel Rosales, principal concurrent du chef de l'Etat à l'élection présidentielle de 2006. Pour assurer sa succession au poste de gouverneur de l'Etat de Zulia, dont Maracaïbo est le chef-lieu, Rosales est en outre parvenu à faire élire son protégé Pablo Perez. Or le Zulia est le berceau de la richesse pétrolière du Venezuela. Dans ses meetings électoraux, Chavez prétendait qu'une victoire de l'opposition y deviendrait un tremplin du séparatisme régional, à l'image du séparatisme que la Bolivie du président Evo Morales, allié socialiste de Hugo Chavez, impute à ses départements orientaux riches en gaz.

Si elle dominait déjà le Zulia et le touristique et insulaire Nueva Esparta, l'opposition domine désormais aussi, les arrachant aux chavistes, les Etats de Tachira, Miranda et Carabobo. Ces deux derniers se classent respectivement 2e et 3e par importance démographique et économique dans le classement national des Etats où la première place revient au Zulia. Les cinq Etats que va gouverner l'opposition rassemblent 11 millions d'habitants, soit 40% des 28 millions de Vénézuéliens. En outre, ces Etats assurent 70% de l'activité économique du pays.

Sur le plan des personnalités aussi, les revers du PSUV présidentiel ont une forte valeur ajoutée. Ses candidats battus dans l'Etat de Miranda et à la mairie de Caracas, Diosdado Cabello et Aristobulo Isturiz, furent respectivement vice-président et ministre de l'Education de Hugo Chavez. Officier putschiste aux côtés de Chavez lors de sa tentative de coup d'Etat de février 1992, Diosdado Cabello assura un bref intérim présidentiel qui contribua à l'échec du putsch manqué mené cette fois contre le président Chavez en avril 2002.

Mais le leader bolivarien souligne à juste titre que son PSUV vient de recueillir 1,5 million de voix de plus que l'opposition, soit 5,6 millions contre 4,1 millions. Est-ce suffisant pour tracer un nouveau chemin vers la réélection présidentielle illimitée? La Constitution, que Chavez n'a pas réussi à réviser par référendum en décembre 2007, lui interdit de briguer un troisième mandat consécutif et donc de se succéder à lui-même en 2013. (NDLR.: Hugo Chavez a déjà remporté trois élections présidentielles, mais celle de décembre 1998 n'était pas régie par la Charte suprême actuelle).

Mythe brisé: les pauvres ne votent pas seulement pour Chavez

Pour planifier ses ambitions et calibrer l'intensité de son socialisme bolivarien qu'il estime "ratifié", le chef de l'Etat devra tenir compte de ces 4,1 millions de voix adverses, qui ne peuvent venir toutes de "fascistes, traîtres, corrompus, valets de l'impérialisme yankee, etc." auxquels Chavez assimile d'ordinaire ses adversaires politiques.

L'insécurité liée à la criminalité galopante (plus de 13.000 homicides annuels, dont le tiers à Caracas), l'inflation la plus élevée des Amériques (elle sera au moins de 30% cette année), les pénuries intermittentes de denrées alimentaires, ainsi que l'insuffisance des infrastructures scolaires, routières, hospitalières et même énergétiques (pannes gigantesques d'électricité) expliquent les progrès de l'opposition, renforcée par des chavistes désenchantés. A Caracas, même la majorité du grand bidonville de Petare, visité dix fois les quatre dernières semaines par Chavez et ses ministres, a boudé le parti présidentiel. Le mythe qui désignait le socialisme bolivarien comme le refuge naturel des pauvres est brisé.

L'effondrement des cours du pétrole et en particulier du brut vénézuélien, passé en 2008 de près de 150 dollars le baril à moins de 50 dollars, ne facilitera guère la relève de ces défis quotidiens. Cette chute des prix du brut complique par ailleurs les largesses pétrolières octroyées par Chavez à divers pays par solidarité socialiste ou pour étendre son influence internationale.

Quoique le nouveau maire élu de Caracas, le social-démocrate Antonio Ledezma, invite Hugo Chavez "à travailler ensemble pour sortir la capitale du chaos et de l'anarchie", l'opposition croit que la principale ambition du président serait de se maintenir indéfiniment au pouvoir, coûte que coûte. Les menaces de "guerre", de "prison", de "lancer les chars d'assaut dans la rue" et de suppression de deniers publics visant les administrations locales et les candidats ou futurs élus "ennemis" ne s'expliquaient-elles, dans la bouche de Chavez pendant la campagne électorale, que par une stratégie visant à la mobilisation de ses partisans pour le scrutin municipal et régional? Où était-ce l'expression d'une ambition présidentielle n'admettant aucune limite temporelle?

D'un bord politique opposé à celui de Chavez, mais relativement respectueux de sa révolution bolivarienne, l'historien mexicain Enrique Krauze, dont l'audience est notable en Amérique latine et en Espagne, regrette surtout "la haine qu'il [Hugo Chavez] a semée". Selon le même historien, "c'est un miracle que les Vénézuéliens ne s'entretuent pas pour leurs idées".


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