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Divorcée, Letizia devra garantir à l'Eglise "le sérieux" de son prochain mariage

Espagne: fixé au 22 mai 2004, le mariage de Letizia Ortiz et du prince héritier Felipe gêne mais sert l'Eglise

Le prince héritier Felipe et Letizia Ortiz, entre la reine Sophie et le roi Juan Carlos
Photo LatinReporters.com
MADRID, dimanche 23 novembre 2003 (LatinReporters.com) - Un communiqué de la Maison royale a fixé au samedi 22 mai 2004, à 12h dans la cathédrale madrilène de l'Almudena, le mariage du prince héritier Felipe de Bourbon avec la journaliste de télévision Letizia Ortiz Rocasolano, roturière asturienne sans fortune, divorcée après un premier mariage civil. Elle deviendra officiellement, le 22 mai, princesse des Asturies et future reine d'Espagne. L'Eglise espagnole se réjouit de rester associée au destin de la famille royale, mais elle dissimule mal sa gêne à l'égard du divorce de Letizia.

Dans l'imagerie collective, l'union de Felipe et Letizia sera exceptionnelle pour au moins trois raisons. D'abord il s'agira du premier mariage royal (les époux étant destinés à régner) célébré en Espagne depuis 1906, soit depuis près d'un siècle. Ensuite, Letizia Ortiz est appelée à devenir, lorsque le prince Felipe succédera à son père Juan Carlos Ier, la première reine de nationalité originelle espagnole depuis 1879. Enfin, Letizia Ortiz n'a aucun lien avec une quelconque famille royale ni avec la noblesse. Jamais jusqu'à ce jour en Espagne, un roi ou futur roi n'a épousé une roturière.

Le prince Felipe soulignait par ailleurs un autre aspect essentiel, plus politique, en déclarant le 3 novembre aux côtés de Letizia que "notre union permettra la continuité de la monarchie parlementaire consacrée par notre Constitution".

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Cette phrase a son poids dans une Espagne où le général Franco, mort en 1975 après 36 ans de dictature, fut l'artisan de la restauration de la monarchie. Juan Carlos Ier ne serait pas actuellement roi si le défunt et très catholique generalisimo ne l'avait pas voulu. L'espoir de la Maison royale est sans doute que la continuité dynastique qu'incarnera le mariage de Felipe et Letizia transforme en monarchistes nombre d'Espagnols qui ne sont encore que "Juan Carlistes", en reconnaissance du rôle décisif joué en février 1981 par Juan Carlos Ier contre une tentative avortée de coup d'Etat militaire.

C'est dans ce contexte et alors que la Constitution postfranquiste de 1978 consacre la laïcité de l'Etat que monarchie et Eglise vont, à l'occasion du prochain mariage, apparaître étroitement liées, au plus grand bénéfice médiatique du catholicisme espagnol. Les réactions de prélats à l'égard de l'union du prince héritier et d'une divorcée en sont d'autant plus observées.

Le cardinal Antonio Maria Rouco Varela, archevêque de Madrid et président de la Conférence épiscopale espagnole, manifestait le 1er novembre au roi Juan Carlos sa joie pour le mariage de son fils. Mgr Rouco Varela annonçait en outre, avec "satisfaction", qu'il officierait en personne l'union religieuse dans la cathédrale de l'Almudena. Ces déclarations furent aussitôt interprétées comme un appui sans réserve de l'Eglise au destin commun de Felipe et Letizia.

Mais six jours plus tard, le doyen de la faculté de Droit canonique de l'Université pontificale de Salamanque, Federico R. Aznar, affirmait à des journalistes surpris que Letizia Ortiz devra, conformément à la législation canonique, se soumettre à "une procédure spéciale" pour garantir devant l'Eglise "le sérieux" de son engagement matrimonial.

Federico R. Aznar précisait qu'on posera "à la fiancée" des questions telles que "Qu'est-ce qui vous a poussée à vous marier civilement antérieurement et pourquoi vouloir maintenant vous marier canoniquement?"

Il s'agit, à en croire le doyen de la faculté de Droit canonique, de s'assurer que le prochain mariage religieux sera "une option sérieuse et non une fraude".

"Peut-être", selon Federico R. Aznar, les Espagnols auraient-ils préféré l'image "plus conventionnelle d'une personne célibataire". Et de rappeler que, jusqu'à présent, les mariages monarchiques s'appuyaient "sur leur caractère d'institution publique, d'image... D'une certaine façon, ils laissaient de côté l'amour et s'il surgissait ensuite, tant mieux. Mais maintenant, c'est une autre perspective qui prime"...

Le père Juan Antonio Martinez Camino, porte-parole et secrétaire général de la Conférence épiscopale espagnole, révélait vendredi dernier à la presse que, début novembre, le cardinal Rouco Varela avait demandé au service juridico-canonique de l'archevêché de Madrid un rapport sur les articles du Code de droit canonique en vertu desquels le mariage du prince Felipe et de "la divorcée" Letizia Ortiz peut être autorisé.

En fonction de ce rapport, a expliqué en substance le père Martinez Camino, la doctrine officielle de la Conférence épiscopale confirme que seul le mariage canonique importe et que Letizia Ortiz, divorcée après une union civile, n'a donc jamais été mariée aux yeux de l'Eglise. En outre, a ajouté l'ecclésiastique, il n'y a pas de raison d'être "plus exigeant à l'égard des princes qu'à l'égard des autres personnes".

"Mais ne croyez-vous pas que le mariage du prince Felipe avec une divorcée soit un encouragement au divorce?" a insisté un journaliste. "Non, c'est plutôt un encouragement au mariage catholique" a répliqué le porte-parole de la Conférence épiscopale.

En conclusion, malgré leur gêne, les prélats semblent moins attirés par un débat juridico-canonique archaïque que par la promotion médiatique exceptionnelle qu'offrira à l'Eglise espagnole son étroite association au prochain mariage royal

De nombreux médias madrilènes parlent de "mariage du siècle". Il sera retransmis, en direct ou différé, par les télévisions de dizaines de pays. Quasi tous les balcons donnant sur la cathédrale de l'Almudena ont déjà été loués pour le 22 mai à des prix atteignant parfois 6.000 euros.

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