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Reflet de la décadence du Vieux Continent
Sommet Brésil-UE : Dilma Rousseff sermonne l'Europe sur la crise
 

   

 
par Christian Galloy, directeur de LatinReporters.com
 

BRUXELLES / MADRID, mercredi 5 octobre 2011 (LatinReporters.com) - "Adopter des ajustements fiscaux récessifs ne suffit pas", car "l'Histoire nous montre que nous ne serons capables de sortir de la crise qu'en stimulant la croissance, en même temps qu'avec des politiques de stabilité et des politiques sociales dont le but est de créer des emplois et des revenus" a asséné la présidente brésilienne Dilma Rousseff, le 4 octobre à Bruxelles, à l'issue du 5e sommet Brésil-Union européenne (UE).

La présidente brésilienne Dilma Rousseff, le 3 octobre 2011 à Bruxelles avec le Belge Herman Van Rompuy (centre), président du Conseil de l'Union européenne, et le Portugais José Manuel Durão Barroso, président de la Commission européenne. (Photo Roberto Stuckert Filho / PR)

Devant deux chiens de garde de l'austérité, le président du Conseil de l'UE, le Belge Herman Van Rompuy, et le président de la Commission européenne, le Portugais José Manuel Durão Barroso, la première femme présidente du Brésil mettait ainsi en doute le bien-fondé de la rigueur budgétaire déshumanisée imposée actuellement par les marchés et par les institutions politiques et monétaires européennes à la Grèce, au Portugal, à l'Irlande, à l'Espagne, à l'Italie et probablement sous peu à d'autres pays de la zone euro.

Comme son homologue des Etats-Unis, Barack Obama, ainsi que tous les syndicats européens et même désormais le Fonds monétaire international (FMI), Dilma Rousseff, tenante du socialisme modéré de son prédécesseur Luiz Inacio Lula da Silva, juge donc que pour sortir de la crise, il faut suivre une politique de stimulation de la croissance couplée à une politique responsable en matière fiscale.

Partageant ce diagnostic, nombre d'analystes admettent que sans mesures compensatoires de relance, l'austérité, le chômage et la récession économique s'autoalimentent. Que l'Union européenne semble l'ignorer, comme le suggère l'invisibilité à Bruxelles d'un brain trust dédié à la relance, expose au reproche d'inconséquence de supposés grands européens acharnés à défendre à tout prix, fût-ce celui de la misère sociale, un symbole de prestige créé peut-être prématurément, l'euro.

Au nom de quelle logique croirait-on que, par exemple, la Grèce puisse honorer ses dettes et l'Espagne conjurer l'énorme menace latente d'une cohorte de quasi cinq millions de chômeurs si les sacrifices additionnels qu'on ne cesse de leur imposer paralysent leur économie et atrophient leurs rentrées fiscales?

Déshumanisation de la Banque centrale européenne

Lundi déjà, Dilma Rousseff avait sermonné l'Europe sur le même thème lors d'une conférence de presse, à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre belge, Yves Leterme.

"Dans notre cas, les ajustements fiscaux extrêmement récessifs n'ont fait qu'approfondir le processus de stagnation, de pertes d'opportunités et d'emplois" rappelait la présidente brésilienne en se référant à la crise de la dette qui frappa l'Amérique latine dans les années 80.

"On sort difficilement de la crise sans accroître la consommation et l'investissement, sans croissance de l'économie" précisait-elle, ajoutant qu'il est important "de tenir compte de la population en période de crise, de faire en sorte qu'elle souffre le moins possible, surtout en ce qui concerne le chômage".

Déclamatoire ou réelle, la préoccupation humaniste de Dilma Rousseff n'effleure même plus les grands argentiers de l'euro. Ainsi, fin août, s'adressant au Premier ministre italien Silvio Berlusconi dans une lettre théoriquement secrète, mais publiée intégralement le 29 septembre dernier par le Corriere della Sera, le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, et son successeur désigné, Mario Draghi, considéraient "essentielles", parmi d'autres "mesures urgentes", "la privatisation à grande échelle" de services publics, "une intervention accrue dans le système des retraites, avec des critères d'éligibilité plus stricts" et "une réduction significative du coût des emplois publics, moyennant, si nécessaire, la réduction des salaires".

Le chef du gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, confronté au taux de chômage record de 21,2% fin août selon Eurostat, a évité de confirmer, mais n'a pas nié, avoir reçu une lettre semblable à la veille de l'intervention de la BCE pour contrer la spéculation sur la dette souveraine italienne et espagnole.

"L'UE peut compter sur le Brésil"... Main tendue intéressée

Tout en faisant la leçon aux Européens à Bruxelles, Dilma Rousseff leur a aussi tendu la main. L'Union européenne peut compter sur le Brésil pour l'aider à sortir de la crise de la dette, a-t-elle annoncé mardi devant MM. Herman Van Rompuy et José Manuel Durão Barroso.

"Vous pouvez compter sur nous... Le Brésil, et là je suis sûre que j'exprime aussi le point de vue des économies en développement, est prêt à prendre sa responsabilité dans un esprit coopératif. Nous sommes des partenaires de l'UE" a assuré la présidente brésilienne.

"C'est un dialogue auquel toute l'Amérique du Sud devrait prendre part", a-t-elle estimé, précisant que "c'est pourquoi les ministres des Finances de l'Unasur (Union des nations sud-américaines) vont se retrouver dans les prochains jours pour coordonner des positions communes" en vue de la prochaine réunion du G20 (pays les plus riches et grands pays émergents, dont le Brésil, le Mexique et l'Argentine), les 3 et 4 novembre à Cannes, au sud de la France.

Reflétant la décadence de l'Europe tout autant sinon plus que le sermon sur la crise, cette main tendue brésilienne (politique et/ou financière?) est aussi intéressée que le fut longtemps l'aide des pays développés aux nations en développement, dont le Brésil lui-même. D'autant que l'UE est le principal partenaire commercial du Brésil et les investissements européens dans ce pays représentent davantage que la totalité de ceux de l'Union en Chine, en Inde et en Russie.

Désormais huitième puissance mondiale selon son produit intérieur brut, le pays de Dilma Rousseff redoute que son essor spectaculaire (+ 7,5% en 2010) ne soit freiné par la crise de l'Union européenne et par ses effets sur l'économie de la Chine, dont l'appétit de matières premières a permis jusqu'à présent à l'Amérique latine de surfer sur les vagues de la crise globale qui déferlent depuis fin 2007 sur les Etats-Unis et l'Europe.

Les BRICS inquiets

Le 22 septembre dernier à Washington, en marge de l'assemblée annuelle du FMI et de la Banque mondiale, le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, avait relevé que si en 2008 l'épicentre de la crise bouleversait les Etats-Unis, il se situe aujourd'hui au coeur de l'Union européenne, avec un risque réel de contagion des pays émergents.

Le ministre Mantega s'exprimait lors d'une réunion des titulaires des Finances des surnommés BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Inquiets de la crise globale, ces grands pays émergents n'écartent pas, pour conjurer la contagion, d'apporter leur aide financière aux pays développés en difficulté. Le gouvernement chinois, assis sur plus de 3.000 milliards de dollars de réserves de change, en investit déjà une part grandissante dans des actifs en euros et il s'est engagé à soutenir la Grèce, l'Espagne ou le Portugal.

La Chine en espère notamment, outre la sauvegarde de marchés extérieurs, une reconnaissance rapide de son statut d'économie de marché, qui favoriserait davantage encore ses exportations.

Le Brésil, pour sa part, demande à l'UE et au reste de la communauté internationale de juger légitime son ambition d'occuper un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Brasilia revendique aussi une redistribution des responsabilités au sein des principales organisations monétaires de la planète afin qu'elles reflètent l'émergence de nouveaux pôles de puissance.

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